Un homme d’appareil aux manettes d’Air Algérie
Fin connaisseur des arcanes du pouvoir, le nouveau patron de la compagnie publique s’est fait une solide réputation de redresseur d’entreprises en difficulté.
Sans réelle surprise, Abdelwahid Bouabdallah, favori ces dernières semaines, prend les commandes d’Air Algérie. Une nomination qui clôt six mois de bataille en coulisses pour désigner un PDG à la tête de la compagnie aérienne nationale après le décès brutal de M’hamed Tayeb Benouis, en août 2007. L’intérim assuré par Hadj Rabia a pris fin le 27 février à l’issue du Conseil des ministres. Dès le lendemain, et avant même sa prise de fonctions officielle le 1er mars, Abdelwahid Bouabdallah partait incognito à la rencontre des salariés de plusieurs services installés dans l’aéroport Houari-Boumedienne.
À 55 ans, le nouveau patron d’Air Algérie s’est bâti une solide réputation de spécialiste des missions difficiles, redressant plusieurs grandes entreprises publiques entre 1991 et 2002. Durant cette période, il a notamment dirigé la Caisse nationale d’épargne et de prévoyance (Cnep) ainsi que l’entreprise nationale de communication et de publicité (Anep). En 1998, et jusqu’en 2002, il s’attaque au redressement de Cosider, le groupe public de BTP.
« Sa réputation est largement méritée, estime l’un de ses proches. Quand il a pris la direction de Cosider, le groupe était menacé de dissolution. Il en a fait un champion algérien. » Un savoir-faire éprouvé qu’il devra mobiliser pour propulser Air Algérie parmi les acteurs majeurs du transport aérien dans le Bassin méditerranéen. Vaste chantier. Il faudra rentabiliser les lignes intérieures, ouvrir des vols à l’international, notamment en Afrique, fidéliser les clients, améliorer la ponctualité, motiver les 7 400 employés, stopper les départs de pilotes, augmenter les salaires, préparer l’ouverture à la concurrence du ciel algérien, trouver le financement pour l’achat programmé de onze nouveaux appareils
« Il a le coffre nécessaire pour réussir, insiste la même personne. À chaque fois, il a su mobiliser les hommes et les engager dans les transformations nécessaires. Il est aussi doté d’une grande capacité d’écoute. » Sa méthode ? Il en a livré les grandes lignes dans une interview en 2002 pour expliquer le redressement de Cosider : « J’ai d’abord mis en confiance le capital humain démobilisé. J’ai ensuite amélioré les relations avec les banques, terminé la filialisation qui était mal engagée, recapitalisé l’entreprise et diminué le portefeuille des dettes et des créances. » Classique, mais efficace.
Si ses qualités de management ont joué en sa faveur, ce grand commis de l’État doit également sa nomination à sa connaissance parfaite des arcanes du pouvoir. Titulaire d’une licence de mathématiques et d’un diplôme d’ingénieur en informatique, Abdelwahid Bouabdallah est aussi un enfant du système. Il a été député lors de la précédente législature (2002-2007). « Je fais partie du FLN », lâchait-il en 2002 pour expliquer son départ de Cosider. Il est né en 1953 au Maroc, où son père, agriculteur, avait émigré près d’Oujda dans les années 1930.
Il n’est pas en terre inconnue
En « réserve de la République » depuis les législatives du 17 mai 2007, il vient de rebondir. Étiqueté parmi les pro-Bouteflika, le nouveau patron d’Air Algérie est classé dans le camp des modernistes et des démocrates au sein du FLN. Mais s’il vient de décrocher la présidence d’Air Algérie, c’est aussi parce qu’il n’atterrit pas en terrain inconnu. En tant que patron de Cosider et de l’Anep, il a été membre du conseil d’administration d’Air Algérie. Et lors de son mandat de député, il a présidé la Commission des affaires économiques de l’Assemblée populaire nationale. Un poste stratégique d’où il a supervisé, notamment, la modernisation de la flotte d’Air Algérie en 2004. Son parcours politique lui aura-t-il donné les atouts pour mener à bien les transformations qui attendent la compagnie ? L’avenir le dira.
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