Dakar, ça l’affiche mal !
Partout dans la capitale sénégalaise, les panneaux publicitaires prolifèrent dans la plus parfaite anarchie. Une pollution visuelle de plus en plus insupportable. Mais une manne financière pour certaines communes…
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Ousseynou Nar Guèye
Éditorialiste sénégalais, fondateur du média numérique Tract.sn
Publié le 24 juillet 2021 Lecture : 2 minutes.
Sénégal : Dakar, la grande métamorphose
Logement, espace public, zones d’activités, complexes culturels… La capitale sénégalaise semble bien partie pour inventer la métropole africaine de demain. Rencontre avec les promoteurs de cette métamorphose.
En juin 2015, le querelleur maire de Mermoz-Sacré-Cœur, Barthélémy Dias, devant le non-paiement de taxes municipales dues à sa commune par les régies publicitaires, fait tout bonnement procéder à la démolition de leurs panneaux. En juillet 2016, la chambre administrative de la Cour suprême – saisie par les sociétés Régipub, Regidak et Cauris Com – annule la délibération du conseil municipal de Sacré-Cœur fixant les taux et les modalités d’assiette applicables à la publicité, ainsi que les redevances sur le mobilier urbain.
Mais le forcing de l’édile avait déjà consacré la mainmise des municipalités sur l’affichage urbain. Les régies n’ont eu d’autre choix que de s’y plier. Les 19 communes de la capitale, héritant cette prérogative de la mairie centrale qui la délivrait jusqu’alors avec parcimonie, ont généreusement et abusivement distribué des autorisations d’affichage.
Une invasion
Depuis, c’est (encore plus) le souk sur les artères dakaroises. Toujours avides de collecter davantage de taxes, les mairies des communes ont donné leur agrément à une multitude de réseaux d’annonceurs, professionnels ou pas, pour ne pas dire à tout le monde : agences de pub, business schools privées, industriels, afficheurs informels… Résultat : l’agglomération s’enlaidit d’environ un panneau d’affichage tous les 100 mètres (au mieux), une prolifération qui défigure le paysage urbain.
Médias de proximité transformés en marteaux-pilons totalitaires, ces cohortes de panneaux publicitaires visent la ménagère de moins de 50 ans. En tête des produits promus, le khessal (produit de dépigmentation cutanée) et les bouillons cubes. Contre les premiers, il y a eu une levée de boucliers avec la campagne ñul kukk (« noire d’ébène », en wolof ), qui, à son tour, a dégainé ses panneaux – et a fait long feu.
Les « annonceurs » moins riches ou plus chiches taguent à coup de peinture leurs marques et leurs produits sur les murs de séparation entre les maisons et l’autoroute qui relie les communes de banlieue à l’entrée du centre-ville. Quant aux plus désargentés, ils plantent sur les carrefours des panneaux en fer peints, plus hideux les uns que les autres et qui, en plus, obstruent la vue aux automobilistes. On se surprend à trouver parmi eux quelques sociétés publiques et ONG ayant pignon sur rue.
Les « annonceurs » moins riches ou plus chiches taguent à coup de peinture leurs marques et leurs produits sur les murs
Toutefois, la modernisation s’en vient avec la très (et trop) remarquable présence de magnifiques « écrans-jours » sur la corniche et sur les carrefours stratégiques de la capitale. Des publicités léchées trouvent également leurs écrins dans les abribus en verre – lesquels ont été vandalisés lors des émeutes de mars dernier, car supposés appartenir à des intérêts français.
Le reste du pays n’a pas échappé à l’invasion des panneaux publicitaires. On les trouve en tir groupé (la plupart vantant les mérites d’une banque), à l’entrée et à la sortie des villes. Puis, ils sont éparpillés, de loin en loin, le long de l’unique route bitumée. Rien à voir avec leur omniprésence à Dakar… Ou comment le Sénégal « utile » et le niveau de développement urbain se mesurent au degré d’intérêt des afficheurs.
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