Ce n’est pas de la torture ? Eh bien, essayez !

Publié le 10 mars 2008 Lecture : 2 minutes.

La torture a été pratiquée en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient, mais nulle part avec autant de cruauté qu’en Argentine, au temps de la sale guerre contre le terrorisme d’extrême gauche. En tant qu’individus et en tant que nation, nous autres, Américains, avons horreur de la torture. C’est même l’une des raisons invoquées par nous pour renverser Saddam Hussein. Cela ne nous empêche pas de pratiquer le waterboarding, le « service des eaux » – autrement dit le supplice de la baignoire -, qui ressemble à une farce d’étudiants mais n’est rien d’autre qu’el submarino pratiqué naguère par les tortionnaires argentins.

La justification de ce que le vice-président Dick Cheney appelle « interrogatoire musclé » est toujours la même : cette pratique inacceptable est censée protéger des innocents contre le terrorisme. Notre gouvernement confie certains de ces interrogatoires à des mercenaires privés qui ne se signalent pas par une délicatesse excessive. Même les Argentins n’étaient pas allés aussi loin. Quant à George W. Bush, il jure que nous ne pratiquons pas la torture, ce qui revient à ajouter l’hypocrisie à la liste de nos péchés. Dès lors que les plus hautes autorités du pays excusent ou même approuvent la torture, comment s’étonner que tant de gens à l’étranger nous détestent ? Et que les rangs des terroristes grossissent inexorablement ? Même si la torture permet d’obtenir des renseignements utiles, quel est son coût à plus long terme ? En employant des méthodes terroristes, nous perdons le droit d’invoquer des justifications morales supérieures.
Je me trouvais récemment dans un groupe de travail à l’université Tufts, près de Boston, aux côtés d’un officier de police sud-africain à la retraite et d’un dirigeant du Congrès national africain qu’il avait autrefois torturé. Tous deux étaient d’accord : les brutalités affaiblissent la police et renforcent la détermination du militant. Au bout du compte, les perdants sont toujours les bourreaux. L’argument selon lequel les méthodes d’interrogatoire extrêmes doivent être réservées à certains cas très précis est sans valeur : une fois que la torture est autorisée, elle se généralise forcément. Pour ceux qui se demandent où elle commence et où elle finit, voici un test simple : essayez. Ce qui définit la torture, ce sont les dommages internes qu’elle provoque – sa trace indélébile dans les circuits mentaux.

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Les terroristes sont là et il nous faut les mettre en échec. Il faut obtenir des informations et savoir les utiliser. La police doit faire son travail et nous ne devons pas hésiter à infliger des peines sévères, lorsqu’elles sont justifiées. Mais nous devons également comprendre que si nous agissons aveuglément, sans prendre en compte les injustices réelles qui sont à l’origine du terrorisme, nous risquons de grossir les rangs de nos ennemis. Si nous combattons le mal par l’inhumanité, que devenons-nous ?

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