Belkhadem se fâche

Coup de sang du Premier ministre, qui reproche à l’ambassadeur des États-Unis de s’intéresser de trop près à la vie politique algérienne.

Publié le 10 mars 2008 Lecture : 2 minutes.

En marge de la cérémonie d’ouverture de la session printanière du Parlement, le 1er mars, Abdelaziz Belkhadem, Premier ministre et secrétaire général du FLN, s’en est vertement pris, sans le citer, à Robert Stephen Ford, ambassadeur des États-Unis à Alger. Il lui reproche de trop s’intéresser au projet de révision de la Constitution, ainsi qu’à l’idée d’un troisième mandat pour le président Abdelaziz Bouteflika, multipliant des réunions avec des chefs de parti et des représentants de la société civile. Ces déclarations stigmatisant « l’ingérence dans les affaires intérieures » ou encore « l’atteinte à la souveraineté nationale » en ont désarçonné plus d’un. Quelques jours auparavant, le 25 février, le Premier ministre avait longuement et chaleureusement reçu David Welch, numéro deux du département d’État.
Les propos de Belkhadem n’ont pas manqué de faire les gros titres des quotidiens algériens datés du 2 mars : « Tensions entre Alger et Washington ? » Abderrachid Boukerzaza, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, tempère comme il peut : « Aucune demande d’explication n’a été envoyée à Son Excellence Robert Stephen Ford », assure-t-il à l’issue du Conseil du gouvernement. Mais si l’incident diplomatique a été évité, l’affaire n’en a pas moins pris une tournure politique. Pour avoir rendu visite, le 18 février, à l’ambassadeur des États-Unis, Saïd Sadi, président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, opposition), s’est senti visé par les déclarations du Premier ministre. Qualifiant ses propos « d’un autre âge », il rappelle à Abdelaziz Belkhadem que lui-même fréquentait assidûment l’ambassade de la République islamique d’Iran à Alger au début des années 1990. Ambiance
Et Robert Stephen Ford dans tout ça ? Il continue à recevoir dans son bunker de la Colonne Voirol, sur les hauteurs d’Alger, personnalités politiques, de l’opposition ou proches du pouvoir, universitaires et journalistes. Rien, dans les usages, ne lui interdit de s’informer. En fait, si l’on devait trouver un contentieux entre Alger et Washington, ce ne sont pas les méthodes de travail de l’ambassadeur Ford, mais le sort réservé aux détenus algériens de Guantánamo. Contrairement aux autres pays de la région, l’Algérie a refusé d’accepter les conditions accompagnant la libération de ses ressortissants qui croupissent, sans jugement, dans le tristement célèbre camp de détention. Les Américains souhaitant jouir de la possibilité d’interroger ou d’interpeller à tout moment les futurs élargis, ces derniers doivent être interdits de déplacement à l’étranger, et donc privés de passeport. Le rejet de ces conditions par le gouvernement Belkhadem retarde d’autant la libération des dix-sept Algériens de Guantánamo et embarrasse Washington, qui envisage la fermeture définitive du camp.

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