Transition

Publié le 12 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Si l’on n’y prend pas garde, la Guinée pourrait imiter le mauvais exemple ivoirien et basculer à son tour dans la violence. Son président, le caractériel général Lansana Conté, au pouvoir depuis dix-neuf ans, est gravement malade. Et, comme toujours en de pareilles circonstances, la fin de règne se précise, les appétits s’aiguisent, les ambitions se révèlent. Confondant parfois vitesse et précipitation, chaque prétendant – et ils sont légion – se voit déjà calife à la place du calife.
L’article 34 de la Constitution guinéenne prévoit qu’en « cas de vacance […] consécutive au décès ou à la démission du président de la République, ou de toute autre cause d’empêchement définitif, la suppléance est assurée par le président de l’Assemblée nationale […] ». L’intérimaire est tenu d’organiser un scrutin présidentiel, « trente-cinq jours au moins, cinquante jours au plus, après l’ouverture de la vacance », qui, elle-même, ne peut excéder soixante jours. Rien de très original ! On trouve des dispositions similaires dans la plupart des Constitutions de la planète.
Ailleurs, ce temps est a priori suffisant pour préparer (et réussir) l’échéance électorale. En Guinée, un tel scénario est improbable, tant il est vrai que le pays vit, depuis longtemps, de manière factice sous l’empire du droit. Jusque-là, la Constitution n’a été pour Lansana Conté qu’une simple référence. En cas de vacance, le président de l’Assemblée nationale, Aboubacar Somparé, serait en droit de solliciter le suffrage de ses concitoyens, ce qu’on peut regretter. L’opposition, et on la comprend au vu des palinodies électorales du passé, n’est en tout cas pas disposée à lui faciliter la tâche. Ses leaders penchent, dans leur majorité, pour une brève « transition militaire », suivie d’une « élection transparente ». Un peu comme celle qu’a connue le Mali, en 1992, avec ATT.
Seulement, voilà ! Qui nous dit que l’officier qui aurait les faveurs de la classe politique pour assurer l’intérim ne cédera pas aux délices du pouvoir ? Après tout, n’est pas ATT (ou Obasanjo cuvée 1979) qui veut ! Les exemples foisonnent encore sur le continent de galonnés qui, installés dans le fauteuil présidentiel, ont vite fait d’oublier leur engagement initial de retourner dans leurs casernes. Attention, donc ! Même avec ses insuffisances, l’intérim prévu par la Constitution mérite donc mûre réflexion.
Il présente, en tout cas, l’avantage de tenir l’armée hors du débat politique, d’éloigner de la Guinée le spectre d’une guerre civile, d’épargner à la sous-région une nouvelle épreuve. En même temps qu’il permet d’assurer une transition en douceur de « l’ère Conté » vers une démocratie pluraliste avec, à la clé, l’espoir de sortir l’ancien « château d’eau » de l’Afrique de l’Ouest du Moyen Âge.

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