« Nous avons perdu le conatct avec les Africains »

Publié le 12 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Jean-Michel Sévérino, ancien
vice-président de la Banque
mondiale, est, à 45 ans, le directeur
général de l’Agence française
de développement (AFD),
depuis le 18 avril 2001. L’AFD
intervient dans plusieurs pays
d’Afrique et dispose d’un réseau
d’agences dans le monde,
chargées de la réalisation
de projets publics et privés.

J.A./L’INTELLIGENT :
L’aide publique au développement
a montré ses limites.
Faut-il pour autant réformer
la coopération française ?

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JEAN-MICHEL SÉVÉRINO : La croissance est problématique dans certains pays, mais il ne faut pas en conclure que l’aide publique au développement (APD) a échoué. Nous avons quelques belles réussites à notre actif : la gestion du problème hydraulique au Burkina et, plus généralement, au Sahel, où l’on a éloigné les risques de sécheresse et facilité une progression du couvert végétal. Mais il est vrai que la France a sous-évalué la pauvreté et ses implications sur le continent.

J.A.I. : Cette prise de conscience a-t-elle permis de repenser l’APD ?

JM.S. : Oui. On ne « fait » plus du développement comme dans les années cinquante. La réalité de ce développement est plus complexe que l’appellation APD, que l’on a conservée par paresse intellectuelle. La fin de la guerre froide a changé notre métier. Les années quatre-vingt ont été marquées par la période post-coloniale et les logiques d’affrontement Est-Ouest ; les liens personnels entre les dirigeants français et les chefs d’État africains étaient très étroits. À cet égard, Jacques Chirac fait partie de l’ancienne génération. Aujourd’hui, les liens sont distendus. Ce n’est pas une mauvaise chose : les raisonnements sont plus pragmatiques ; la France-Afrique et les porteurs de mallette ne sont plus un phénomène structurant des relations entre Paris et le continent. Mais, simultanément, les investissements ont baissé. Nous avons perdu le contact. La décennie quatre-vingt-dix a été celle d’une erreur d’appréciation.

J.A.I. : D’où la nécessité d’employer de nouveaux instruments…

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JM.S. : Repenser l’APD, c’est élargir ses objectifs et, donc, les moyens utilisés. On utilise davantage d’instruments à effet de levier, comme des prêts, des garanties ou des prises de participation. Il a fallu évoluer vers des instruments sectoriels ou macroéconomiques, et moins raisonner en termes de projets, encore que cette stratégie n’ait pas été totalement abandonnée. Les organisations doivent se réformer pour s’aligner sur ces nouveaux objectifs. Mais contrairement à ce qui se passe aux États-Unis, la hausse annoncée de l’APD ne s’accompagnera pas de la création d’une agence qui aurait en charge sa répartition.

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