Appel au secours

Profondément affectés par la crise qui sévit en Côte d’Ivoire, les membres du Cours Sainte-Marie-de-Hann, groupe scolaire sénégalais, lancent un SOS.

Publié le 12 mars 2003 Lecture : 3 minutes.

Nous, membres de la communauté éducative du Cours Sainte-Marie-de-Hann, avec plus de 4 100 élèves, plus de 560 employés et leurs familles, représentant 52 nationalités différentes, d’Afrique et des autres continents, nous avons décidé de réagir ensemble et d’exprimer ouvertement cet appel solennel à la paix et à la réconciliation.
Nous sommes en effet très inquiets et préoccupés par l’évolution tragique de la situation en République de Côte d’Ivoire. Un pays ami très gravement secoué par des événements regrettables et sanglants. Ceux-ci se succèdent très dangereusement, depuis le 19 septembre 2002, désarticulant la nation tout entière et provoquant de nombreuses meurtrissures, à tous les niveaux du peuple.
La flambée des violences, les conflits politiques, ravageurs et meurtriers, les dures tensions de nature ethnoreligieuse ou régionaliste nous blessent profondément et nous émeuvent.
Car nous aimons et respectons la Côte d’Ivoire, ce pays frère et cette nation modèle. La désagrégation de l’unité nationale déstabilise profondément l’équilibre de la société, bloque le développement du pays et déstabilise toute la sous-région. Voilà pourquoi nous ressentons le besoin d’un sursaut salutaire, urgent et global, pour faire cesser les hostilités.
Nous refusons le rôle peu glorieux assigné à la « société civile », qui consiste uniquement à compter les morts et à dénombrer les blessés au quotidien, selon les informations diffusées par les médias ou les rapports présentés par les diverses institutions. Nous rejetons cette passivité se résumant à déplorer, régulièrement et après-coup, les divers assassinats et les tueries, les charniers et autres barbaries. Cela déshonore l’humain et bafoue notre continent. Nous ne pouvons pas rester indifférents !
Nous disons « non » ! Non à toutes formes de manoeuvres politiques fondées sur les préjugés de races ou d’ethnies, sur les haines religieuses et l’intolérance. Nous nous révoltons contre toutes ces méthodes insultant Dieu et violant le respect de la dignité humaine, quelles qu’en soient les raisons données et d’où qu’elles viennent. Ces manières sournoises, dressant les populations les unes contre les autres, sont à dénoncer et à rejeter, quel que soit leur prétexte. Cette manière de faire ne se justifie d’aucune façon et ne peut être tolérée !
Nous ne pouvons accepter que l’on puisse utiliser, délibérément, la population juvénile d’un pays pour des actions xénophobes, haineuses, manipulant ainsi l’enthousiasme et l’énergie spontanée qui la caractérise. De telles méthodes, qui mettent en danger toute la jeunesse d’une nation, risquent d’incendier à jamais les esprits et les coeurs, marquant définitivement leur vie, pour toujours. C’est là un saccage extrêmement malheureux et inadmissible. Il nous écoeure et nous le condamnons !
Nous lançons cet « appel au secours » à toutes les autorités de la Côte d’Ivoire et de la sous-région ouest-africaine, qu’elles soient politiques ou religieuses, militaires ou sociales, intellectuelles ou économiques. Tous les responsables, d’où qu’ils soient, doivent se sentir concernés par l’essentiel, c’est-à-dire par la sauvegarde de l’humain. Nous vous supplions de tout faire pour apporter un changement sensible de cap et de méthodes. Il faut d’urgence arrêter « l’escalade » désastreuse que nous constatons. Nous vous demandons instamment de bien vouloir réagir très rapidement et à tous les niveaux, avec tous vos moyens de pression et les capacités d’influence dont vous disposez.
Il s’agit de briser « le cercle vicieux de la souffrance et de la mort », cet enchaînement fatal des actions et des réactions qui mène à la déchirure, à la catastrophe et à l’hécatombe irréparable.
Que l’esprit du Dieu miséricordieux et d’amour, par-delà toutes les différences de confessions et de cultes, puisse revenir dans les coeurs : du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest. Que les forces du Bien puissent venir supplanter, de façon décisive et continue – grâce à votre contribution déterminée et persévérante – les bassesses malheureuses du Mal : la haine et la vengeance.
Il est grand temps de se mobiliser et d’agir en harmonie, de tous côtés. Unissons donc toutes les bonnes volontés et les influences positives pour permettre le rétablissement urgent d’un juste équilibre en Côte d’Ivoire. En préservant l’intégrité du territoire et la cohésion de toutes les populations qui s’y trouvent ; en restaurant l’esprit de solidarité et de cohabitation pacifique ; en favorisant l’épanouissement de tous et de chacun.

Appel signé par 4 457 membres du Cours Sainte-Marie-de-Hann, « école d’éducation à la paix à caractère international » (Grand Prix Unesco pour la paix 1991), Dakar, Sénégal.

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