Retour à l’école

Publié le 11 février 2003 Lecture : 3 minutes.

L’ancien tout-puissant ministre guinéen de l’Économie et des Finances, Ibrahima Kassory Fofana, a reçu, le 2 février, à la prestigieuse American University de Washington DC, deux diplômes de doctorat de troisième cycle : l’un en économie, l’autre en développement des finances et banques. Celui qui était perçu par maints observateurs comme le prétendant le plus sérieux à la succession de Lansana Conté a choisi de se retirer dès son surprenant limogeage du gouvernement, le 25 janvier 2000. Après avoir exercé un réel pouvoir, joui d’une influence à nulle autre pareille sur le président Conté et touché aux privilèges de nombreux pontes du régime sur injonction des institutions de Bretton Woods, Fofana ne s’est pas fait que des amis. Il a choisi, pour se « faire oublier », de partir, sur les suggestions de nombre de ses amis.
Quel étrange parcours que celui de ce quinquagénaire (il est né en 1953 à Forécariah) qui a fait le tour de tous les postes stratégiques de l’administration économique et financière guinéenne ! Membre de la division des études économiques de la présidence de la République en 1978 ; directeur général de la coopération internationale en 1986, après avoir gravi tous les échelons de cette division du ministère du Plan et de la Coopération ; directeur général des investissements publics en 1991 ; administrateur général des grands projets (avec rang de ministre) en 1994 ; ministre du Budget et de la Restructuration du secteur parapublic en 1996, puis ministre de l’Économie et des Finances, en 1998, dans l’équipe de Sidya Touré.
Au bout de ce parcours, il quitte le gouvernement pour des raisons diversement interprétées : implication dans une tentative de coup d’État, conflit avec l’armée autour des dépenses de celle-ci…
Au lendemain de son départ du pays, il est soupçonné d’être impliqué dans des affaires financières comme celle dite « des timbres fiscaux » qui a opposé le Comité national de lutte contre la corruption à l’homme d’affaires Salifou Camara, ancien président de la Fédération guinéenne de football (voir J.A.I. n° 2166). Une montagne qui devait accoucher d’une souris, le tribunal ayant prononcé un non-lieu, faute de preuves. « Ce n’est là, réagit Fofana, qu’une cabale de plus montée contre moi par ceux qui craignent mon retour aux affaires. À mon départ du gouvernement, j’ai défié quiconque d’apporter la moindre preuve de mon implication dans les affaires de corruption évoquées. Je n’ai, de toute façon, jamais été jusqu’ici interpellé par la justice ni à titre d’accusé ni à celui de témoin. »
Aux États-Unis, où il vit avec son épouse et ses deux filles, Fofana affirme consacrer le plus clair de son temps à des recherches universitaires. Contre toute attente, il dit s’abstenir de toute activité politique mais reconnaît, toutefois, suivre de près ce qui se passe au pays. Avant de préciser entretenir de bons rapports avec la plupart des leaders politiques guinéens, aussi bien de la mouvance présidentielle que de l’opposition. À l’exception de l’ex-Premier ministre Sidya Touré, auquel l’oppose, depuis 1998, une sourde inimitié.
Comme presque tous, Fofana subit l’exil et l’anonymat. Il affirme garder des liens forts avec son univers francophone. À preuve, sa fille Nancy, 16 ans, fréquente l’établissement français de Washington.
Dans la redistribution des cartes qui s’annonce en vue de l’après-Conté, il avance : « Au regard de tout ce que je suis en train de faire en ce moment, je ne me sens pas concerné. À court et moyen terme, je vise plutôt une carrière internationale. Et la poursuite de mes recherches académiques pour un doctorat d’État en 2005. » Avant de préciser : « Je n’exclus pas, toutefois, de me remettre au service du pays si un climat favorable de travail était créé par l’avènement aux affaires d’une nouvelle génération de vrais patriotes, modernes et ouverts aux réalités de notre temps. »

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