Bénin : Reckya Madougou, des palais présidentiels à la prison de Missérété
L’opposante béninoise poursuivie pour « association de malfaiteurs et terrorisme » a saisi le groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire. Dépeinte comme un agent déstabilisateur par les fidèles de Patrice Talon, elle est érigée en figure de la résistance par ses soutiens.
18 avril 2016. Faure Essozimna Gnassingbé, Patrice Talon et Thomas Boni Yayi gravissent d’un même pas énergique les marches recouvertes d’un tapis rouge. Elles les mènent à Alassane Ouattara, qui les attend dans sa résidence d’Abidjan, pour une rencontre de « réconciliation » entre le « roi du coton » devenu président et son prédécesseur, en guerre ouverte depuis plusieurs mois.
Sur les images, les sourires semblent sincères. Après l’entrevue, les quatre hommes posent devant les caméras avec force accolades théâtrales. Patrice Talon, qui s’est officiellement installé au palais de la Marina dix jours auparavant, l’assure : « Les intrigues de la compétition politique ne peuvent pas prendre le pas sur nos responsabilités d’œuvrer à la paix. » Sur un ton bonhomme et enjoué, Thomas Boni Yayi, lui, le jure : « Nous étions des amis, nous restons des amis, et nous resterons des amis. »
De réconciliatrice à « terroriste »
Bien que présente ce jour-là, l’une des chevilles ouvrières de cette rencontre n’apparaît pas dans le cadre. Elle a pourtant compté parmi ceux qui, en coulisses, ont le plus poussé à cette mise en scène d’une « amitié » retrouvée, dont on sait qu’elle fera finalement long feu.
Reckya Madougou, ex-ministre de la Justice de Thomas Boni Yayi, dont elle était très proche, n’a pas ménagé ses efforts, alors qu’elle était conseillère du président togolais, pour amener l’ancien et le nouveau président béninois à enterrer la hache de guerre. Elle aura joué de sa proximité avec Faure Gnassingbé, mais aussi de ses liens avec certains des hommes clés du dispositif d’Alassane Ouattara, au premier rang desquels feu Hamed Bakayoko.
Quelques jours plus tard, elle saluera l’ambiance « bon enfant » qui, assurait-elle, a prévalu lors des retrouvailles entre les « deux vieux copains ».
Un mandat de Patrice Talon plus tard, l’ex-ministre devenue conseillère spéciale du président togolais s’est lancée dans la course à la magistrature suprême dans son pays. Et, de l’avis de ses proches et partisans, c’est ce qui lui vaudrait aujourd’hui d’être enfermée à la prison civile de Misérété, sous le coup d’accusations « d’atteinte à la sûreté de l’État », d’« association de malfaiteurs » et de « terrorisme ».
Elle est dans une cellule de 8 m2 avec cinq autres femmes
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