Bil Aka Kora, une star sur tous les fronts

Tandis que sort son troisième album, l’artiste burkinabè est la vedette du dernier film de Boubacar Diallo et prête son image à une publicité pour des motos.

Publié le 10 janvier 2005 Lecture : 3 minutes.

Bil Aka Kora peut compter sur ses fans. Ceux-là mêmes qui l’ont découvert il y a dix ans, alors qu’il se produisait dans les « maquis » (petits restaurants) de Ouagadougou, et qui l’applaudissent aujourd’hui quand il se déchaîne sur les scènes les plus prestigieuses du pays. À 33 ans, l’enfant de Pô, agglomération proche de la frontière ghanéenne, enchaîne les prestations médiatiques : il sort un troisième album, tient la vedette du dernier film de Boubacar Diallo, Sofia, et prête son image à la marque de motos JC sous le slogan « Roulez avec une star ». Mais la star en question, vêtue d’un jean et d’un tee-shirt noir sur lequel brille le pendentif en argent qui ne le quitte jamais, reste modeste. Bil n’oublie pas ses origines.
« La première fois que j’ai chanté, c’était avec l’orchestre militaire de mon village, raconte-t-il. J’en garde d’ailleurs un assez mauvais souvenir ! Et puis mon père, qui était à la fois tailleur et cultivateur, de même que ma mère ne voyaient pas d’un bon oeil mes velléités musicales. En 1997, j’ai remporté le Grand Prix national de la chanson populaire, et c’est à ce moment-là que j’ai décidé d’abandonner mes études de maths et de physique pour me consacrer à la musique. »
Bil Aka Kora a d’abord dû réfléchir au style qu’il allait adopter. Entre tonalités traditionnelles, mélopées jazzy, rythmes reggae sur lesquels il pose sa voix grave, il crée un genre nouveau, le djongo. Mais, pour l’auteur compositeur, la musique n’est pas tout : il accorde une valeur tout aussi grande, sinon davantage, au texte et au message qu’il véhicule.
Dans son premier album, Douatour, le faiseur de pluie, Bil raconte l’eau et le rôle important qu’elle joue dans son pays, n’hésitant pas à rappeler les mesures engagées par le gouvernement pour préserver l’environnement. « C’est aussi un clin d’oeil à nos traditions, car, aujourd’hui, le faiseur de pluie disparaît de nos villages. » Est-ce le souci de préserver les spécificités locales qui, à l’ère de la mondialisation, pousse Bil Aka Kora à chanter en asséna ? Un pari risqué, car moins de 1 % seulement de ses compatriotes le parlent. « C’est surtout une langue que je peux me permettre de torturer à ma guise pour obtenir une belle mélodie. Parce que c’est ma langue maternelle », confie le trentenaire. Peu importe : le succès de son premier album est immédiat. Près de 20 000 cassettes de Douatour se vendent au Burkina. Un triomphe qui lui ouvre les portes des scènes internationales.
En 1999, Bil Aka Kora joue en Belgique, dans le cadre d’un festival de la Francophonie. Puis il voyage en Côte d’Ivoire, au Togo… « C’étaient mes premiers voyages à l’étranger, explique le créateur du djongo, au rythme duquel vibre désormais toute l’Afrique de l’Ouest. En remettant au goût du jour cette danse traditionnelle, j’ai voulu valoriser les notions d’énergie, de force, d’émotion qu’implique la séduction. »
Trois ans plus tard, Bil Aka Kora sort un deuxième album, plus cosmopolite, Amboulou. S’il utilise le kasséna dans la plupart de ses titres, il a également recours au dioula et à l’anglais, tandis que la musique peule est mise à l’honneur. Nouveau succès inconditionnel. Nouveau périple hors de l’Afrique. Au Canada, cette fois, et en France. « J’ai beaucoup appris en observant la façon dont travaillent les musiciens à l’étranger. Moi qui avais tendance à privilégier l’inspiration, j’ai découvert la rigueur artistique. »
Dans son troisième album, Dibayagui, sorti à la fin de 2004, Bil Aka Kora s’ouvre encore davantage aux musiques du monde. Il chante en duo avec une Canadienne, invite un violoniste taiwanais et chante en français. Quant aux textes, ils évoquent la crise meurtrière que traverse la Côte d’Ivoire. « Il ne faut pas se laisser happer par le mépris de l’autre. Le combat pour la paix passe aussi par un combat contre soi-même », conclut l’artiste.

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