Le dernier tabou

Deux associations lancent une campagne pour l’égalité des hommes et des femmes devant l’héritage.

Publié le 9 octobre 2006 Lecture : 2 minutes.

Le code du statut personnel, dont on vient de célébrer le cinquantième anniversaire, avait aboli la polygamie et la répudiation, fixé l’âge minimum pour se marier, institué le mariage civil (avec obligation de consentement de la jeune fille) et l’égalité dans le divorce. Mais son initiateur, l’ancien président Habib Bourguiba, n’était pas parvenu à imposer une réforme qui lui tenait à cur : l’égalité devant l’héritage.
La charia (loi islamique) stipule qu’« à même degré de parenté, les hommes ont deux fois plus que les femmes ». En lançant une campagne sur ce thème, l’Association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement (Afturd) et l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) savent donc qu’elles s’attaquent à un sujet tabou. La rencontre avec la presse organisée, le 13 août, pour le lancement de ladite campagne n’a d’ailleurs suscité qu’un d’écho très limité. Cela ne les empêche pas de poursuivre leur mouvement, dans une quasi-indifférence. Avec le concours de la fondation (allemande) Friedrich-Ebert, elles ont notamment publié un manifeste intitulé « Quinze arguments de plaidoyer pour l’égalité successorale entre les sexes », ainsi qu’un ouvrage collectif en deux volumes.
« Nous avons tenté d’associer à notre initiative les deux Chambres du Parlement et le ministère des Affaires de la femme, explique Khadija Chérif, la présidente de l’ATFD. Hélas ! à l’exception du Conseil supérieur des droits de l’homme, aucune institution officielle ne nous a répondu. Nous avons cependant le soutien de plusieurs enseignantes de l’Université des sciences religieuses de la Zitouna, à Tunis, ainsi que de trois partis politiques : Ettajdid, le FDTL et le PDP. »
« Notre plaidoyer pour l’égalité dans l’héritage vise à parachever le dispositif juridique assurant la pleine citoyenneté des femmes », explique pour sa part Souad Triki, la présidente de l’Afturd. « Dieu n’a pas interdit l’égalité [entre l’homme et la femme], pourquoi ses créatures se permettent-ils de contrarier sa volonté ? » renchérit l’avocate Dorra Mahfoudh. Quant à la juriste Sana Ben Achour, elle estime que l’égalité devant l’héritage n’est « pas impensable ni impraticable en Tunisie », les avancées socio-économiques ont rendu le modèle de la famille patriarcale et le système traditionnel d’héritage largement obsolètes. Bref, il ne s’agit pas de faire la révolution, mais d’accorder le dispositif juridique à l’évolution de la société.

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