Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 10 août 2004 Lecture : 6 minutes.

Trop de Gbagbo et de Wade
Qu’ont donc de particulier Laurent Gbagbo et Abdoulaye Wade pour être tant « aimés » par les journalistes ? Pourquoi ces derniers sont-ils si friands de tout ce qui concerne ces deux chefs d’État ? Tenez : après les tristes événements des 25-26-27 mars 2004 à Abidjan, Laurent Gbagbo est resté à la « une » de tous les journaux pendant près de trois mois. Les 20 et 21 juin 2003, des combats opposent les fidèles de Soro aux partisans du sergent IB dans le nord de la Côte d’Ivoire. Bilan : des dizaines de morts et plusieurs charniers (selon l’Onuci et l’opération Licorne). On en parle à peine dans les médias.
Autre exemple : le 9 juillet 2004, Madiambal Diagne est placé en détention à Dakar au Sénégal pour divulgation de documents administratifs confidentiels et diffusion de fausses nouvelles. Du coup, Abdoulaye Wade est à la « une » de tous les journaux parlés et écrits. Au même moment, le 8 juillet, le directeur de publication du journal Le Citoyen, Maka Gbossokotto, est inculpé pour injures et diffamations publiques et incarcéré à la prison de Bangui. Cette information est traitée sous forme de flashs dans les journaux parlés, et la presse écrite y accorde quelques lignes. La liste n’est pas exhaustive.
Réponse : C’est un fait que certains pays retiennent plus que d’autres l’attention des médias. Et qu’en outre on parle plus des dirigeants que des opposants. Sous tous les cieux, les journalistes ont tendance à privilégier les sujets qui, croient-ils, intéresseront le public le plus large.

Vous avez dit UA ?
Sans vouloir être trop défaitiste, je vous avouerai que je ne crois pas trop au succès de l’Union africaine. Il n’y a qu’à faire le tour de l’Afrique pour constater que les principes prônés par cette organisation ne sont généralement pas appliqués, en particulier ceux relatifs à la bonne gouvernance et à la démocratie. Non seulement la plupart des dirigeants prennent plaisir à s’éterniser au pouvoir contre la volonté du peuple, mais ils ne se préoccupent pas du développement de leurs pays respectifs. J’apprécie beaucoup Alpha Oumar Konaré pour les efforts inlassables qu’il ne cesse de déployer pour le continent africain, mais je pense qu’il devrait avoir un discours franc envers ses anciens collègues. J’ajouterai même qu’il devrait s’inspirer de l’attitude de l’Union européenne avec la Turquie, en adoptant la fameuse politique de la carotte : n’adhèrent au sein de l’UA que les bons élèves. Mieux vaut être seul que mal accompagné, nous dit l’adage. De cette manière, l’UA pourra, enfin, jouir d’une crédibilité indéniable sur le plan international et forcer, par la même occasion, les détracteurs de la démocratie à suivre le bon chemin.

la suite après cette publicité

Brando sans Brando
J’ai apprécié votre « Adieu » consacré à Marlon Brando (J.A.I. n° 2270). J’avais moi-même un projet de film avec l’acteur américain, Brando and Brando, l’histoire d’un jeune homme fasciné par le rêve américain qui s’envole pour Hollywood et sonne chez l’acteur. Brando avait accepté de participer à ce film, et je l’ai rencontré plusieurs fois pour finaliser le projet. Il devait tourner ses scènes à partir du 20 juillet 2004. Pour lui rendre hommage, j’ai décidé de ne pas interrompre la préparation du film. Brando sans Brando. Immortel.

Nouveau ministère au Tchad
Je me réjouis de la mise en place, au Tchad, d’un nouveau ministère chargé du Contrôle d’État et de la Moralisation. Il faut désormais que le gouvernement donne les moyens financiers, humains et matériels à Mme Mariam Ali de mener à bien sa mission. Je félicite le gouvernement tchadien pour la création de ce ministère tant attendue.

Côte d’Ivoire : gare à l’effet tache d’huile
La jeunesse ivoirienne incarnée par Guillaume Soro et Charles Blé Goudé n’est pas un exemple à imiter ni à laisser perdurer. Comme eux, nous sommes des millions de jeunes Africains à avoir fait des études et contraints de broyer du noir par la force des choses.
Nous sommes nombreux à vouloir serrer les mains du président Chirac, côtoyer des personnalités africaines telles que Obasanjo, Wade, Bongo, Alpha Konaré, Eyadéma, etc. Nous aspirons tous à devenir l’idole de jeunes patriotes ; fréquenter les allées du pouvoir tout en étudiant en Angleterre…
Cependant, par respect de l’ordre et de l’autorité établis, nous avons choisi de gravir marche à marche l’échelle de la démocratie et des élections, et surtout d’agir dans le bon sens.
En laissant trop durer la crise ivoirienne, la classe politique africaine, toutes tendances confondues, est en train de s’amuser avec ses propres testicules sans peut-être le savoir. Il est en effet à craindre que certains jeunes assoiffés de pouvoir et précocement tentés par la grande bouffe ne cherchent à rééditer le scénario ivoirien ailleurs en Afrique. Et ce serait bien dommage.

Et la projection Peters ?
Le continent africain figurant à la page 62 du numéro 2269 est représenté selon la projection Mercator (Gerhard Kremer Mercator, 1512-1594). Cette projection donne une idée erronée des surfaces, les distances entre les parallèles augmentant avec la latitude. Je me suis demandé pourquoi vous ne choisissez pas la projection Peters (Arno Peters, 1916-2002) qui offre l’avantage de montrer les pays proportionnellement à leurs tailles relatives. Il suffit de comparer la superficie de la France (551 000 km2) à celle de l’Éthiopie (1,1 million de km2) sur l’une et l’autre projection pour en convenir.
Réponse : Vous avez raison. Mais il se trouve que la projection Peters n’a pas connu le succès qu’elle mérite : seules des publications militantes l’utilisent. Le grand public, auquel un journal comme J.A.I. s’adresse, y perdrait ses repères, car les contours des continents sont déformés. Mais la question mérite réflexion.

la suite après cette publicité

Les démons de la RD Congo
Dans le « Plus RD Congo » (J.A.I. n° 2272), Cheikh Yérim Seck ne mentionne nulle part la situation des populations congolaises rwandophones du Sud-Kivu (de Bukavu, de la plaine de Ruzizi et d’Uvira) qui ont été obligées de se réfugier au Rwanda et au Burundi pour fuir les exactions perpétrées par les forces gouvernementales. La chasse à l’homme sur la base de sa morphologie entraîne le Congo sur une pente glissante qui n’augure rien de bon pour la paix et pour la tenue d’élections libres. Parler de l’attaque de Bukavu par le général Laurent Nkunda sans parler de ce qui l’a provoquée occulte le fond du problème.

Quid du Darfour ?
Je suis très étonné de constater que J.A/l’intelligent fait apparemment peu de cas de ce qui se passe dans le Darfour.
Réponse : Comme vous le voyez dans ce numéro, où nous consacrons cinq pages au sujet, cette lacune est comblée. Dans le numéro précédent, déjà, un envoyé spécial avait rendu compte de la situation dramatique dans cette région du Soudan.

la suite après cette publicité

Saddam, ce héros
« Seul celui qui marche sur la braise la ressent », dit un vieux proverbe tunisien. De même, parmi les peuples arabes, seul le peuple irakien sait qui est vraiment Saddam Hussein (à l’exception peut-être des Koweïtiens). Il est effrayant de voir combien d’Arabes considèrent encore cet homme comme un héros. Et ce d’autant plus que leurs sentiments procèdent d’une sincère bonne volonté. Les Arabes, pour leur plus grand malheur, n’ont jamais réussi à se défaire de l’image du chef ou du sauveur providentiel qui hante leur imaginaire depuis Saladin. Quand donc nos peuples comprendront-ils que si changement il doit y avoir, et ce dans quelque domaine que ce soit, il ne doit et ne peut émaner que du peuple et de lui seul ?

Tourisme à visage humain
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre très bon dossier sur le tourisme en Afrique (J.A.I. n° 2270). Une réserve cependant : alors que vous consacrez beaucoup de place à mettre en évidence, à juste titre d’ailleurs, la beauté des paysages de l’Afrique, les possibilités qu’elle offre pour les amateurs de trekking ainsi que la richesse de sa faune et de ses sites historiques, vous passez presque entièrement sous silence l’enrichissement culturel que peuvent apporter au visiteur étranger les Africains eux-mêmes. Si j’ai gardé un souvenir indéniable de la beauté de l’environnement naturel de ce continent, mes moments forts furent les discussions que j’eus avec ses habitants et l’observation de leurs manières de faire, qu’il s’agisse d’instituteurs du pays dogon, au Mali, de nomades, qui m’invitèrent à prendre le thé sous la tente, ou, tout simplement, de vendeurs à la sauvette des grandes villes.
Réponse : Vous avez complètement raison de souligner l’enrichissement culturel que procure la rencontre de l’autre. C’est vrai en Afrique. C’est également vrai ailleurs. C’est une vérité universelle, voilà pourquoi nous n’en avons pas fait une spécificité du « tourisme africain ».

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires