Seif el-Islam l’Africain

Le fils aîné de Mouammar Kadhafi annonce la création d’une Compagnie africaine d’investissement (CAI) dotée d’un capital de 1 milliard d’euros.

Publié le 10 août 2004 Lecture : 3 minutes.

Le 24 juillet à l’hôtel Bawabat Ifriqiya (la Porte de l’Afrique), à Tripoli, Seif el-Islam Kadhafi, le fils du Guide de la Jamahiriya libyenne, a présidé à la naissance de deux institutions : le Forum de Syrte, du nom de la ville libyenne où, le 9 septembre 1999, la création de l’Union africaine a été décidée, et la Compagnie africaine d’investissement (CAI).
La première, dont Seif lui-même assure la présidence, est conçue sur le modèle du Forum international de Davos : rencontres entre décisionnaires, études diverses, promotion de l’esprit d’entreprise et du développement à l’échelle du continent, etc. Mais il ne s’agit pas seulement de palabres à l’africaine. Car parallèlement, la CAI, dont le lancement a eu lieu en présence du Premier ministre Chokri Ghanem, a été pourvue d’un capital de 1 milliard d’euros destiné à financer une série de projets de développement, dans le cadre de la stratégie définie par l’Union africaine. Selon Mohamed Azzarouk Rajeb, président de la Compagnie libyenne pour les investissements extérieurs (Lafico) et proche ami de Kadhafi Jr, elle envisage d’investir dans les hydrocarbures, les mines, le tourisme, les télécoms et la banque.
Côté libyen, les actionnaires- fondateurs de la CAI sont deux institutions publiques, la Compagnie pour les investissements pétroliers et la Compagnie pour les investissements en Afrique, qui détiendraient à elles deux 25 % du capital. Une autre compagnie baptisée « Libye », mais opérant au Gabon, figure également au nombre des actionnaires. L’Afrique du Sud sera associée à l’opération par le biais de sa compagnie pétrolière nationale, mais on ignore encore le montant de sa participation. Phumzile Mlambo-Ngcuka, la ministre sud-africaine de l’Énergie, était présente à Tripoli le 24 juillet.
Mais la grande nouveauté est que la Libye, désormais acquise aux vertus de la mondialisation, n’a pas hésité à associer au projet un opérateur non africain. Il s’agit d’une filiale du groupe international Petro-Line, spécialisé dans la construction des oléoducs et des gazoducs (son siège est au Canada). Ce dernier n’a toutefois pas officiellement confirmé son engagement. Selon les Libyens, le capital de la CAI reste ouvert aux autres pays africains et aux investisseurs étrangers. L’objectif est de mobiliser des financements pour investir en Afrique quelque 10 milliards d’euros au cours des prochaines années.
Il se confirme donc que Seif el-Islam fait de plus en plus figure d’héritier présomptif. Et qu’il entend rester fidèle à l’engagement stratégique de son père dans les affaires africaines. La mondialisation telle qu’il la conçoit se fonde, explique-t-il, « sur l’égalité et non sur la pauvreté, sur la solidarité et non sur la concurrence féroce, sur la diversité et non sur le prêt-à-porter ».
La création du Forum de Syrte et de la CAI est son second grand projet continental. Il revendique en effet la paternité d’un plan de constitution d’une force africaine de maintien de la paix (l’African Union Rapid Reaction Force), dont il aurait eu l’idée en octobre 2001 à Pretoria, lors du Sommet de l’UA sur le Burundi. En décembre 2002, il a rendu publique une première ébauche de son projet, qui prévoit la mise en place d’un état-major d’environ 400 membres pourvu d’un budget de 250 millions de dollars. La création d’armées de terre (20 000 hommes), de l’air et de mer (4 000 chacune). Selon Kadhafi Jr, la Libye, l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Éthiopie, l’Algérie et l’Égypte pourraient en être les principaux contributeurs. Ce plan n’a pas déchaîné l’enthousiasme de tous les chefs d’État africains. La divulgation du volet économique des grands projets Kadhafiens amènera-t-elle les sceptiques à reconsidérer leur position ?

(Voir aussi pp. 42-44.)

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