Guerre insurrectionnelle généralisée

Publié le 10 août 2004 Lecture : 3 minutes.

Pour la première fois, une vague d’attentats parfaitement coordonnés a frappé, le dimanche 1er août, au moment des vêpres, plusieurs églises chrétiennes en Irak, faisant au moins 10 morts et 50 blessés. Quatre ont eu lieu à Bagdad. Dans le même temps, deux voitures piégées ont explosé à Mossoul, à 370 km au nord de Bagdad, devant des églises. À Kirkouk, dans le nord également, une importante explosion s’est produite devant des maisons appartenant à des chrétiens. Le Vatican a condamné ces attentats « très préoccupants », alors que « l’Église catholique a toujours été en première ligne pour la paix ». Ils ont eu un retentissement particulier en Europe, mais ils sont significatifs du climat de guerre insurrectionnelle organisé qui règne en Irak. Robert Fisk, l’envoyé spécial permanent du quotidien britannique The Independent, s’en fait régulièrement l’écho. Dans un article publié le 29 juillet, il notait ainsi que l’avant-veille, un soldat de la 1re division d’infanterie avait été la 904e victime militaire américaine en Irak depuis le début de l’invasion.

Mais si les chrétiens et les occupants étrangers sont militairement ciblés, les représentants de l’ordre irakien sont eux aussi délibérément visés. Le 28 juillet, dans la ville sunnite de Baqouba, un kamikaze a fait exploser sa voiture dans une file d’attente de quelque 600 candidats à des emplois dans la police. Bilan : une centaine de morts et 150 blessés parmi les civils venus faire leurs achats dans le voisinage. Le commissariat de police de Baqouba est, comme à peu près partout, protégé par un mur de béton. Mais les candidats étaient si nombreux qu’on les a fait attendre à l’extérieur. « Une condamnation à mort », écrit Fisk.
Il rappelle qu’une quinzaine de jours auparavant un autre kamikaze s’était fait sauter devant un centre de recrutement de l’armée à Mahmoudiyah, et que le 17 juin une voiture chargée d’explosifs avait foncé sur des candidats à des emplois policiers, faisant 35 morts.
Ce même 28 juillet, Robert Fisk est allé rendre visite au quartier général de la police à Bagdad. L’entrée principale était gardée par cinq policiers derrière lesquels flottaient sept drapeaux noirs en l’honneur de leurs sept collègues disparus depuis six semaines. À l’intérieur, un haut gradé a confié à Fisk : « Je ne peux pas dire que les choses s’améliorent. »

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Toujours ce même 28 juillet, un affrontement a opposé à Souweya, près de Kout al-Imara, des insurgés à des forces de police aux côtés desquelles se trouvaient des soldats américains et ukrainiens. Il y aurait eu 7 morts parmi les policiers et 35 parmi les assaillants. On n’en sait guère plus, car la région est trop dangereuse pour que des journalistes occidentaux s’y risquent. Souweya est une ville chiite, et c’est la première fois que de tels affrontements y étaient signalés.
Et encore, note Fisk, beaucoup d’incidents plus ou moins graves ne sont-ils pas portés à la connaissance du public. Dans cette page du 29 juillet de The Independent, il en évoque toute une série qui se sont produits les 20, 22 et 23 juillet et qui « montrent à l’évidence que l’Irak du nouveau Premier ministre nommé par les Américains est encore plus dangereux et plus violent qu’auparavant ». Ces incidents ont été consignés dans les archives militaires américaines.
Ainsi, le 20, rien qu’au nord de Bagdad, on a tiré sur des convois américains à Mandali, Samarra, Baqouba, Doulouija et Mouqdadiyeh. Ils ont été attaqués à la grenade à Tikrit, Samarra et Kirkouk. Des échanges de coups de feu ont eu lieu à Mouqdadiyeh, Balad, Haouija, Samarra, Tikrit et Khalis.

Le 22 juillet, toujours au nord de Bagdad, on a dénombré en divers endroits 17 attentats à la bombe, et découvert dans le Tigre le corps décapité d’un Bulgare enlevé comme otage, Ivalyo Kepov. Le 23 juillet, un convoi de mercenaires occidentaux a été attaqué au sud de Samarra, un convoi civil à Baqouba. Un ancien général irakien, Salim Blaish, a été abattu à Mossoul par des tireurs qui se sont enfuis à bord d’une voiture. Des dizaines de civils irakiens meurent ainsi chaque jour, estime Robert Fisk.

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