Du nouveau sous le soleil

Le taux d’électrification des zones rurales ne dépasse pas 50 %. Une solution parmi d’autres : l’énergie solaire.

Publié le 10 août 2004 Lecture : 3 minutes.

A 120 km au sud-est de Casablanca, dans la commune rurale de M’Garto, le village de Lakrafi se résume à une cinquantaine de maisons disséminées sur les contreforts de l’Atlas. Le réseau électrique n’arrive pas jusqu’ici, mais, depuis le mois de décembre 2003, des panneaux solaires ont fleuri sur les toits et les terrasses. Est-ce la fin de la bougie et de la lampe à pétrole ? Apparemment, l’énergie solaire ainsi captée permet d’alimenter en moyenne quatre ampoules et un poste de télévision. Mais elle « ne suffit pas à faire fonctionner un frigo », regrette le président de la commune.
Pourquoi Lakrafi n’est-il pas raccordé au réseau ? Parce que « l’habitat y est trop dispersé pour qu’on puisse tirer des câbles », explique-t-on à l’Office national d’électricité (ONE). Une telle opération ne serait ni rentable économiquement ni réalisable techniquement. Chaque fois que le coût de raccordement d’un foyer dépasse 2 700 euros, l’ONE opte pour une énergie renouvelable, comme le solaire ou les minibarrages hydroélectriques. Dans le monde rural, le taux d’électrification est actuellement d’environ 50 %. Grâce au Programme d’électrification rurale globale (Perg), il devrait être de 100 % d’ici à 2011.
En 1994, un programme de ce type avait déjà été lancé par le Centre de développement des énergies renouvelables (CDER), avec le soutien de l’Agence française de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Une trentaine de localités avaient été équipées de capteurs solaires gérés par des associations de villageois chargés de la maintenance et du recouvrement des factures. Lesdites associations s’étant vite retrouvées en déficit, l’ONE a cette fois fait appel à des opérateurs qui assurent à la fois la fourniture et la maintenance des « kits photovoltaïques ». Il s’agit de BP Solar (qui équipe 4 000 foyers), du marocain Sun Light Power (8 000) et de Temasol (16 000), dont le capital est détenu par Total, EDF et Total Énergie, leur filiale commune. Ce dernier vient de remporter un appel d’offres pour l’équipement de 37 000 foyers supplémentaires. Le kit de 4 lampes coûte environ 4 500 euros. L’ONE prend en charge 70 % de ce coût initial, l’usager 10 % et Temasol 20 %, amortis grâce à la redevance acquittée par les clients : environ 65 dirhams (6 euros) par mois, pendant dix ans. Ce système combinant gestion privée et subvention d’État permet, selon Michel Courillon, chargé de mission à l’Ademe, d’assurer une maintenance efficace. Et notamment d’assurer sans problème le changement des batteries – dont la durée de vie est d’environ trois ans.
L’énergie solaire est-elle, pour les pays du Sud, la solution miracle ? « Si le choix est entre le solaire ou rien, alors oui, le solaire est préférable, estime René Massé, du Groupe de recherche et d’échange technologique [Gret]. Mais je ne suis pas sûr qu’il favorise le développement et la lutte contre la pauvreté. Il faut le savoir : l’arrivée de l’électricité ne provoque pas automatiquement la création de richesses et d’emplois. D’abord, parce que l’électricité bénéficie en premier lieu aux « moins pauvres ». Ensuite, parce que les activités d’accompagnement [information, appui technique, microcrédits d’équipement, etc.] font souvent défaut. »
Et puis, l’énergie solaire n’offre pas autant de possibilités que le réseau classique. Ainsi, à Lakrafi, les panneaux installés ne sont pas assez puissants pour permettre le développement d’activités artisanales et/ou industrielles. « Sous prétexte de faire du développement propre, il arrive qu’on ne fasse pas de développement du tout », souligne l’expert du Gret.
Reste que, grâce aux progrès de la recherche, cette forme d’énergie devrait être, à l’avenir, de moins en moins chère et de plus en plus performante. Au Maroc, le CDER, qui, au mois de mai, a signé une convention de coopération avec l’Ademe, y travaille.

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