Tempête dans un verre de thé

Publié le 9 juillet 2007 Lecture : 3 minutes.

Les affirmations vont bon train : le Maroc, plutôt discret sur la scène du Moyen-Orient depuis la disparition de Hassan II, y ferait une rentrée fracassante. Normalisation des relations avec Israël, échange d’ambassadeurs, visite de Mohammed VI à Jérusalem avec escale à Ramallah pour apporter un surcroît de légitimité à Mahmoud Abbas
Des informations parues ces derniers mois dans la presse israélienne et relayées par des médias arabes se trouveraient ainsi confirmées, amplifiées. Pour qui reste sceptique, la rencontre, le 4 juillet à Paris, entre Tzipi Livni, la ministre israélienne des Affaires étrangères, et son homologue marocain Mohamed Benaïssa ne laisse aucun doute.
Ce n’est pas par hasard, explique-t-on encore, que les retrouvailles israélo-marocaines se sont déroulées dans la capitale française. L’hyperactivisme tous azimuts dont fait preuve Nicolas Sarkozy depuis son arrivée à l’Élysée n’épargne pas les dossiers du Moyen-Orient. Ce 4 juillet, le président français reçoit à déjeuner le roi Abdallah de Jordanie avant de passer une heure avec Tzipi Livni. Il avait accueilli, le 29 juin, Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, avant de s’entretenir au téléphone, le 3 juillet, avec Ehoud Olmert, le Premier ministre israélien. Visiblement, la France bouge. Bernard Kouchner, le nouveau chef de la diplomatie, déclare qu’il a des « idées » pour résoudre le conflit et parle même d’« occasion historique ».
Au-delà, on assure que les Américains ont renoncé à leur immobilisme au Moyen-Orient et que dans cette nouvelle et prometteuse conjoncture les Marocains jouent déjà les éclaireurs. À y regarder de près, on découvre que ce sont là des constructions certes séduisantes, mais dont les fondations demandent à être consolidées. S’agissant en tout cas de la place assignée au Maroc, les réalités, n’en déplaise à Kouchner, sont bêtement prosaïques et modestes. D’abord, la rencontre Benaïssa-Livni n’avait rien de secret. Elle a eu lieu à l’hôtel Raphaël, et le ministre marocain était flanqué de Taïeb Fassi Fihri, ministre délégué aux Affaires étrangères, et de Yassine Mansouri, patron de la DGED (services extérieurs). Les Marocains l’ont appris en regardant le journal télévisé le soir même, et une dépêche de la MAP a précisé dans quel esprit se sont déroulées les discussions avec les Israéliens. À l’ordre du jour : l’initiative de paix arabe et rien d’autre. Pas question que le royaume fasse cavalier seul en procédant à une quelconque normalisation séparée avec l’État hébreu. Pas question non plus de choisir le Fatah contre le Hamas. Et cette position de principe a été rappelée à Livni.
Quant à la visite du roi à Jérusalem, elle relève d’un fantasme pavlovien des Israéliens. Hassan II a eu droit à l’invitation régulièrement et son fils n’y coupe pas. « Dès que vous rencontrez un dirigeant israélien, confie un ambassadeur marocain, il invite le roi, s’empresse de le dire à un journaliste, et il ne reste après qu’à fixer la date ! »
La rencontre de Paris marque-t-elle un retour de la politique de Hassan II, empreinte d’un certain interventionnisme volontariste ? « En aucune façon, répond-on à Rabat. » Ici, comme en d’autres domaines, Mohammed VI a initié une rupture tranquille. « Le Maroc n’est pas un acteur du Moyen-Orient. Il peut tout au plus accompagner la politique des protagonistes, mais nullement s’y substituer. N’ayant pas des intérêts propres, il ne peut se prévaloir que de sa bonne volonté, laquelle, par définition, est conditionnée par la volonté des parties directement concernées. » « C’est précisément parce que nous avons été sollicités, explique-t-on à Rabat, que nous avons repris l’initiative. » Par qui ? « Tout le monde : les Israéliens, avec insistance ; tous les Palestiniens : Mahmoud Abbas ; mais aussi, c’est essentiel, le Hamas. »

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