Hassan el-Basri

« Proposer des services bancaires à chaque Marocain » : telle est la volonté affichée par Hassan el-Basri. Un homme qui a largement contribué à l’essor du secteur bancaire dans le royaume, ainsi qu’au développement de l’établissement qu’il dirige aujourd’

Publié le 9 juillet 2007 Lecture : 5 minutes.

Jeune Afrique : À l’approche des vacances, votre principal concurrent, Attijariwafa Bank, lance une opération en direction des Marocains résidant à l’étranger (MRE). Vous sentez-vous menacé ?
Hassan El-Basri : Dès la fin des années 1960, les Banques populaires se sont intéressées au marché des MRE. Pendant une vingtaine d’années, nous avons fait un travail énorme en termes d’accès aux services bancaires. Nous avons joué un rôle considérable en ce sens pour rassurer les migrants sur leur épargne et leurs transferts. Nous estimons que cet accompagnement a joué un rôle important dans la pérennisation ?des liens entre les MRE et leur pays d’origine. À la fin des années 1980, les autres banques ont commencé à s’intéresser à ce marché. Même si nous sommes encore en position ?de force, avec 56 % de parts de marché selon les statistiques de la Banque centrale du Maroc, il faut consolider, voire améliorer cette position. C’est pourquoi nous allons développer notre réseau sur l’ensemble des pays européens.

De quelle façon ?
Par l’ouverture de nouvelles agences en Belgique et en France, où nous sommes déjà présents. De plus, dès que nous aurons l’agrément de passeport européen, que nous attendons des autorités bancaires françaises, nous nous implanterons dans les principaux pays de l’Union européenne.

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Vous avez bon espoir de l’obtenir, ce fameux passeport ? Qu’en ferez-vous ?
Le passeport européen nous permet d’accéder à une communauté de migrants plus large tout en déployant un réseau de proximité. Nous comptons également élargir notre gamme de produits dans le pays d’accueil ainsi qu’une activité relais pour ce qui est de sa relation bancaire au Maroc.
On assiste à une véritable frénésie d’ouverture d’agences au Maroc. Quelle est votre approche ?
Depuis l’origine, en 1961, l’objectif des Banques populaires est d’améliorer la bancarisation de l’économie du pays. C’est pourquoi nous nous sommes installés même dans les régions lointaines, pour y développer la culture bancaire. Cette stratégie se vérifie encore aujourd’hui par la densité et la géographie de notre réseau. Pour l’essentiel, nos concurrents installent en revanche leurs agences sur les grands axes. En ce qui nous concerne, la moitié de nos agences sont dans ce que j’appellerais « le Maroc des terroirs ». Depuis le début des années 2000, toutes les banques élargissent leur réseau. Nous-mêmes le faisons, avec quatre-vingts ouvertures en 2006 et cent cette année. Notre stratégie est guidée par notre mission de bancarisation. Nous devons progressivement couvrir tout le territoire et proposer des services bancaires à chaque Marocain.

Avez-vous des produits spécifiques pour amener plus de gens vers la banque ?
Il y a un principe fondamental qui nous guide dans notre action, c’est de généraliser l’accès aux services bancaires. C’est ce que j’appelle la lutte contre l’exclusion bancaire. Un Marocain qui, aujourd’hui, veut ouvrir un compte peut le faire dans une Banque populaire sans que l’on exige de lui un revenu minimum, ni un versement préalable, ni un engagement sur d’autres services. L’ouverture du compte est possible pour tous, et elle est aussi synonyme de mise à disposition d’une carte monétique et d’accès à tous les services de la banque.

Tous ne sont pas des clients très fortunés. Ce n’est pas bon pour votre rentabilité
Premièrement, ce n’est pas une action que nous entreprenons à perte. Elle a son business plan et sa rentabilité. Deuxième point, nous nous concentrons sur notre marché de base, celui qui fait la force de notre groupe, la clientèle de masse. Jusqu’à la fin des années 1990, nous étions les seuls à nous y intéresser. Aujourd’hui, toutes les banques offrent les mêmes produits. Nous avons un avantage et des atouts sur cette clientèle, et nous tenons à conserver cette avance. Enfin, outre les particuliers, il y a d’autres clients à bancariser : les PMI et les TPE. D’après la Banque centrale, 60 % des financements des PMI marocaines sont assurés par notre groupe.

Et en ce qui concerne les très petites entreprises, les TPE ?
Pour les TPE, nous avons conçu et lancé un vaste programme de bancarisation avec un package qui leur est adapté. Il comprend l’accès à un ensemble de services bancaires dans les meilleures conditions tarifaires. C’est un marché à fort potentiel. On parle de plus d’un million de TPE au Maroc, avec un taux de bancarisation qui reste très faible et une culture de l’argent liquide qui reste très forte. Nous mettons en place des outils pour amener un nombre croissant d’entrepreneurs vers la banque. Par exemple, nous avons lancé cette année la carte Ajir [« le salarié », en arabe dialectal, NDLR] pour les entreprises qui emploient des ouvriers. Les salaires sont directement versés sur la carte, utilisée ensuite dans les guichets automatiques.
Comment résumer votre stratégie ?
Elle consiste à consolider nos positions acquises sur nos marchés traditionnels et à en conquérir de nouvelles. Il s’agit en particulier de l’activité corporate, notamment les financements structurés de projets d’envergure. Depuis 2000, elle est totalement intégrée dans notre stratégie et, dès 2001, nous avons été les premiers à financer un projet de 170 millions d’euros pour une nouvelle centrale électrique, aux côtés de banques étrangères. C’était une première au Maroc, d’une part en raison de l’importance du montant, d’autre part parce que c’était le premier financement structuré du pays qui soit réalisé par une banque du pays. Nous intervenons désormais dans la plupart des grands projets structurés au Maroc, dans le tourisme, les télécoms ou encore le pétrole. Et nous proposons aux entreprises publiques de solliciter d’abord les banques marocaines, avant d’aller à l’étranger.

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À propos d’entreprises publiques 20 % du capital de la Banque centrale populaire est coté à la Bourse de Casablanca. Y a-t-il une perspective de privatisation à terme ?
Il faut lever toutes les équivoques sur ce plan. Premièrement, nos banques régionales, au nombre de onze, sont entièrement privées puisque leur capital appartient à leurs clients sociétaires. S’agissant ensuite de la Banque centrale populaire (BCP), où l’État, directement ou indirectement, est encore majoritaire, un processus d’ouverture de son capital a été entamé dès 1996. Dans ce cadre, une première opération de cession de 21 % du capital de la BCP a été effectuée au profit des Banques populaires régionales, suivie immédiatement de l’introduction en Bourse de 20 % de son capital. Il faut également préciser que la loi n’impose pas un minimum quant à la présence de l’État dans le capital de la BCP.

Vous rendez compte à l’État ?
L’État cadre le plan de développement et les orientations stratégiques et, pour le reste, il nous laisse travailler, il n’intervient pas au quotidien dans le fonctionnement. Évidemment, l’État figure à notre conseil d’administration et, en ce sens, nous devons lui rendre des comptes. Il est également présent à notre comité directeur, qui est l’instance suprême de management du groupe, où nous avons cinq représentants de l’État et cinq représentants des Banques régionales. C’est là que se définissent la stratégie et les objectifs. Je dois dire que nous travaillons en grande symbiose. Nous disposons d’une très grande autonomie, et nous sommes gérés comme une banque privée.

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