Vain tumulte

Publié le 9 juin 2008 Lecture : 2 minutes.

Mes amis s’étonnent de mon silence après la décision d’un tribunal français d’annuler le mariage d’une demoiselle coupable, d’après son fiancé, d’avoir menti sur sa virginité. Mais que voulez-vous que je dise ? La loi, c’est la loi. En l’occurrence, la juridiction relative aux « valeurs essentielles du mariage » est d’inspiration chrétienne et je ne vois pas ce que l’islam ou la charia viennent faire là-dedans. D’ailleurs, si le fiancé n’avait été musulman, croyez-vous que l’affaire aurait fait la une des journaux ?
Reste que le mensonge n’est sans doute pas le meilleur moyen d’assurer la pérennité d’un foyer. Et que la jeune fille a bel et bien menti. Imaginons que le mariage n’ait pas été annulé : quel avenir pour ce couple obligé de cohabiter malgré un désaccord de fond ? Pourquoi voulez-vous que je tente de raisonner un type qui croit judicieux d’exiger l’intégrité d’un hymen comme caution de bonheur éternel ? Et pourquoi défendrais-je une fiancée qui n’a pas eu le courage d’avouer à son prétendant qu’elle n’était pas vierge, de l’informer qu’elle n’en concevait nulle honte, et de lui suggérer d’aller chercher ailleurs si, décidément, il ne voulait pas d’elle ? À sa place, j’aurais proposé à toutes mes copines une opération de défloration générale. Ne cherchez pas, les gars, nous avons toutes jeté notre petite chose par-dessus les moulins Ça, c’eût été du courage !

On peut être athée ou mormon et exiger la virginité. On peut être musulman et préconiser, comme l’a fait récemment un cheikh de l’université Al-Azhar, au Caire, de mentir sur la virginité. C’est ce que j’appelle un combat d’arrière-garde. Je sais, je vais me faire incendier par Ni putes ni soumises, mais c’est de bonne guerre : elles ont un créneau, une raison de se battre, dussent-elles du même coup relayer le mythe du musulman arriéré et macho. J’ai toute chance de déplaire à Élisabeth Badinter, qui s’indigne en boucle sur les antennes de l’atteinte portée aux corps des femmes. Comme si le cas inverse – une jeune femme qui exigerait la chasteté de son compagnon – était susceptible de susciter une polémique sur l’intégrité du corps de l’homme ! Mais je ne verserai pas non plus dans l’idiotie de certains mes coreligionnaires exhibant fièrement la preuve de la consommation de leur union. Après le voile, voici l’hymen ostensible. Quelle époque ! Et quel vain tumulte !

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