Mohamed Boussaid

Pénurie de personnel qualifié, retards dans les nouveaux projets balnéaires… Le ministre du Tourisme et de l’Artisanat sait que le pari n’est pas encore gagné.

Publié le 9 juin 2008 Lecture : 4 minutes.

Mohamed Boussaid incarne la génération des quadras à qui le Palais veut confier le développement du royaume. Né en 1961 à Fès, diplômé de la prestigieuse École nationale des ponts et chaussées de Paris et détenteur d’un MBA, il est membre du comité exécutif du Rassemblement national des indépendants (RNI), proche du pouvoir. Boussaid a commencé sa carrière en tant qu’ingénieur-conseil à la Banque commerciale du Maroc (devenue Attijariwafa Bank) avant d’assurer les fonctions de directeur général adjoint d’une société de production et de négoce de produits chimiques, puis d’intégrer la direction des grandes entreprises à la Banque marocaine pour le commerce et l’industrie (BMCI). En 1995, il entre au ministère des Travaux publics en tant que chef de cabinet. En 2004, il devient ministre chargé de la Modernisation des secteurs publics, avant de prendre la tête, en octobre dernier, du ministère du Tourisme et de l’Artisanat.

Jeune Afrique : Il y a moins de nuitées dans les hôtels, mais plus de visiteurs. Comment l’expliquez-vous ?
Mohamed Boussaid : Il faut prendre en compte plusieurs indicateurs pour avoir une idée précise de l’évolution de la fréquentation. Les nuitées passées dans les établissements touristiques classés sont effectivement en baisse de 4 % au premier trimestre 2008 [à 3,7 millions], mais les arrivées sont en hausse de 16 % [1,4 million]. Les recettes en devises générées connaissent également un léger fléchissement, de 3,5 %, à 11,7 milliards de dirhams [1 milliard d’euros]. Il n’y a néanmoins pas de raisons de s’inquiéter. Le tourisme reste en excellente santé en dépit d’une conjoncture internationale peu favorable et d’une concurrence agressive des pays méditerranéens. Nous espérons toujours atteindre nos prévisions : accueillir 10 millions de touristes par an en 2010. Le développement des liaisons low-cost, avec la libéralisation de l’espace aérien, doit nous permettre d’y parvenir en drainant une nouvelle clientèle qui ne souhaite pas passer par les voyages organisés.

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Entre tourisme culturel, balnéaire, saharien, de santé, d’affaires ne dilue-t-on pas les priorités ?
Nous avons plusieurs cartes à jouer. Marrakech représente 31 % de l’activité et les villes impériales constituent toujours notre premier produit. Nous avons fait beaucoup d’efforts pour améliorer les infrastructures balnéaires, qui représentent désormais 30 % à 40 % de nos revenus. Nous allons continuer à valoriser au mieux nos 3 500 km de côtes. Nous signerons prochainement une convention de développement de la région de Tétouan, au nord du pays. Parallèlement, nous développons le tourisme de montagne, de nature, de désert et d’oasis, notamment à travers la mise en Âuvre de pistes de découverte et la réhabilitation des monuments historiques.

La station balnéaire de Saïdia, sur la côte méditerranéenne, projet phare du plan Azur, connaît d’importants retardsÂ
Il n’y a aucune inquiétude à avoir. Ce chantier de 700 hectares a mobilisé 3,2 milliards de dirhams d’investissement. Nous avons déjà une capacité hôtelière de 3 200 lits répartis sur 3 hôtels. Nous pourrions ouvrir dès cet été, mais nous préférons attendre que tous les travaux soient achevés pour assurer une ouverture dans des conditions optimales. La station accueillera ses premiers touristes lors de la saison estivale 2009.

Avec l’essor des compagnies aériennes low-cost, on observe une évolution de la clientèle. Le Maroc a-t-il vocation à recevoir les « routards » européens ?
On assiste actuellement à l’émergence de nouvelles pratiques, à côté des voyages classiques proposés par les tour-opérateurs. On voit de plus en plus de touristes qui fractionnent leurs vacances, se décident à la dernière minute et achètent leurs billets d’avion ou leurs vacances sur Internet. Cette clientèle ne doit pas être négligée. Les économies réalisées en termes de transport sont dépensées localement, dans l’hôtellerie, la restauration et les loisirs.

La qualité des prestations est très variable d’un hôtel à l’autre. Que comptez-vous faire concernant les normes de classification des établissements et leur contrôle ?
J’avoue que nos services n’effectuent pas de contrôles assez réguliers sur toute l’année et sur l’ensemble des établissements. Le problème vient souvent du vieillissement des complexes, leurs propriétaires n’opérant pas les investissements nécessaires à leur mise à niveau. Néanmoins, nous sommes en train d’effectuer un important travail pour que les normes hôtelières marocaines soient conformes aux standards internationaux. Nous réfléchissons également aux meilleures solutions pour améliorer la fréquence et la rigueur des contrôles.

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N’y a-t-il pas un désengouement pour Marrakech, alors que des projets de plus en plus importants y voient le jour ?
Marrakech se porte bien. Il est devenu une marque à l’échelle internationale et se vend bien dans les pays occidentaux. Les investisseurs lui font confiance puisqu’il y a quelque soixante-dix grands projets en cours, pour plusieurs dizaines de milliards de dirhams. Nous allons réaliser une étude pour voir comment positionner la ville à l’horizon 2020 et lever les contraintes en matière d’infrastructures, d’eau et de foncier.

Où en sont les projets touristiques dans les provinces du Sud ?
La mise en valeur de la station balnéaire « Plage blanche », à proximité de Sidi Ifni, est confiée à l’opérateur espagnol Fadesa. La zone touristique de Oued Chbika, à 55 km au sud de Tan Tan, est attribuée à l’égyptien Orascom. Nous misons également sur le développement de Tarfaya, avec la mise en place d’une ligne maritime avec les Canaries. Enfin, nous préparons le lancement d’un grand projet touristique autour de Dakhla [NDLR : voir p. 75]. Cette presqu’île, très ventée, offre aussi d’importantes opportunités en matière de pêche, de planche à voile, de surf et de kitesurf. Nous avons également lancé, en avril, le projet Pays d’accueil touristique désert et oasis (Patdo) pour valoriser les régions d’Errachidia, de Zagora et de Ouarzazate.

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