La chemise de Sarkozy
On pouvait acheter, la semaine dernière, la chemise de Nicolas Sarkozy sur un marché en plein air, du côté d’El-Jadida, au Maroc. Étonnant, non ? Rassurez-vous, il n’y a rien d’irrespectueux dans cette information, rien de croustillant ni d’inconvenant. On ne se moque pas des grands de ce monde dans cette rubrique mais on dit les choses comme elles sont. Si la chemise à Sarko se négocie à El-Jadida, on le rapporte, ce n’est tout de même pas un crime de lèse-président.
Vous me dites :
– Tu te f du monde.
Pas du tout. C’est tout à fait authentique. Jeudi dernier, je suis allé faire un tour sur un petit marché d’El-Jadida qu’on appelle Al-Hamra. En fait, ce n’est ni plus ni moins qu’un grand champ pierreux, à la lisière de la ville, où de rugueux marchands jettent par terre, sur des bâches, des vêtements d’occasion venus d’Europe par conteneurs entiers. Ce qui explique, en passant, que les adolescents d’El-Jadida, même les plus démunis, paradent sur le boulevard en vêtements griffés de grandes marques de France ou d’Italie : tout cela ne coûte que quelques dirhams à Al-Hamra. J’ai même vu, de mes yeux vu, des petits retraités français déambuler dans la poussière du souk, à l’affût d’une bonne affaire. (Il est devenu du dernier chic pour les Français de prendre leur retraite au Maroc. On y est quasiment exempté d’impôtÂ)
Bref, c’est là qu’un vendeur à la criée m’a apostrophé en me proposant la chemise de « Sarrrrkouzy » à 10 dirhams, soit même pas un euro : sic transit gloria mundi. Je lui ai répondu en mettant en doute la provenance de la chose, mais lui, sérieux comme un pape, n’en démordait pas : c’était bien le vêtement (usagé) du locataire de l’Élysée qu’il exhibait à la foule. J’ai passé mon chemin, bien sûr, préférant aller le dos nu plutôt que couvert de l’oripeau d’autrui ; mais tout cela m’a fait réfléchir. Que signifiait l’argument de vente du marchand de fripes ? Était-ce de l’humour au second degré, ce blédard futé ayant entendu à la radio le président de la République admettre que les caisses étaient vides ? En a-t-il déduit que ledit président en était réduit à vendre sa chemise ? Et qu’il était somme toute plausible que le vêtement eût atterri à Al-Hamra ? Voilà en tout cas un bel exemple de mondialisation.
Amis lecteurs, je vous conseille de faire de temps en temps une virée du côté d’El-Jadida. On finira bien par y vendre les bottes de George Bush ou la moustache de StalineÂ
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