La bande des Six

Un projet de traité interdisant les bombes à sous-munitions a été adopté par 109 pays le 30 mai à Dublin. Reste une poignée de – puissants – réfractaires : Chine, Inde, Israël, Pakistan, Russie et, surtout, États-Unis.

Publié le 9 juin 2008 Lecture : 2 minutes.

Le 30 mai à Dublin, après douze jours de difficiles négociations, un projet de traité interdisant l’utilisation des bombes à sous-munitions a été adopté par 109 pays. C’est un triomphe pour Jonas Gahr Store, le chef de la diplomatie norvégienne, qui en est à l’origine. Le traité sera officiellement signé les 2 et 3 décembre, à Oslo, et entrera en vigueur à la mi-2009, quand il aura été ratifié par les signataires.
Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies, Jakob Kellenberger, le président du Comité international de la Croix-Rouge, et d’innombrables associations de défense des droits de l’homme se sont réjouis de cette mise hors la loi. En revanche, les États-Unis, Israël, la Russie, la Chine, l’Inde et le Pakistan continuent de s’y opposer. L’administration Bush a même multiplié les démarches dans un certain nombre de capitales pour faire capoter le projet. Le revirement du Royaume-Uni en faveur de celui-ci a été décisif.

Quatre terrains de foot
Lancées par des pièces d’artillerie ou lâchées par des avions, les bombes à sous-munitions, dites aussi « à fragmentation », présentent la particularité de s’ouvrir en plein vol en libérant des dizaines, voire des centaines de « petites bombes » – sphères ou cylindres métalliques – qui « arrosent » une parcelle de territoire de la taille d’environ quatre terrains de football. Parfois guère plus grosses que la pile d’une lampe torche, ces petites bombes ont la puissance d’une grenade à main. Conçues pour ralentir ou arrêter une armée en marche, elles peuvent tuer ou blesser à une distance comprise entre 10 m et 50 m. Le problème est qu’entre 5 % et 25 % d’entre elles n’explosent pas en touchant le sol. De véritables champs de mines sont ainsi créés, faisant courir aux civils – ouvriers agricoles et enfants, en premier lieu – des risques mortels.
Israël est le dernier pays à avoir utilisé des sous-munitions, au Sud-Liban, en juillet 2006. Il en aurait lâché 4,3 millions, dont environ 1 million n’ont pas explosé. Depuis la fin des hostilités, ces engins ont tué 40 personnes et fait 218 blessés, pour la plupart des civils. L’objectif était de faire fuir la population de la région. Et, surtout, de l’empêcher de revenir. Les États-Unis approvisionnent Israël en bombes à sous-munitions depuis trente ans. Eux-mêmes y ont déjà eu recours en Afghanistan, en Irak et jadis au Vietnam. Ces armes « aveugles » contreviennent aux lois de la guerre, puisqu’elles ne font aucune distinction entre civils et combattants.
Le projet de traité stipule que les signataires s’engagent à ne pas utiliser de bombes à sous-munitions, à détruire leurs stocks dans un délai de huit ans et à financer des programmes pour débarrasser les anciens champs de bataille des petites bombes non explosées. Le texte comporte néanmoins un certain nombre de points préoccupants, dont le moindre n’est pas que les signataires sont libres de coopérer militairement avec les non-signataires.
Pourtant, les plus optimistes sont convaincus qu’il sera bientôt impossible d’utiliser des bombes à fragmentation sans provoquer de vives réactions. Espen Barth Eide, le ministre adjoint à la Défense norvégien, estime qu’elles sont désormais « moralement hors la loi ». C’est peut-être un voeu pieux. Car il reste à démontrer que les États-Unis, Israël et les autres non-signataires ont bien reçu le message.

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