Qui aide le plus ? et le mieux ?

Réunis à Évian, du 1 er au 3 juin, les membres du G8 ont promis une augmentation de leur assistance financière. Mais les pays les plus riches du monde ne sont pas forcément les plus généreux…

Publié le 10 juin 2003 Lecture : 4 minutes.

U ne fois de plus, l’aide a été l’un des points à l’ordre du jour du sommet du G8, du 1er au 3 juin, à Évian (voir pages 34-39). Et pour cause : les huit pays membres de ce groupe fournissent à eux seuls les trois quarts de l’aide publique au développement, soit 42 milliards de dollars (environ 36 milliards d’euros) sur un total de 57 milliards en 2002 (versements nets déduction faite des remboursements). Mais s’ils sont en tête par le volume de leurs transferts, ils se classent parmi les derniers au regard de leur performance relative. En effet, le Comité d’aide au développement (CAD), qui regroupe vingt-deux pays donateurs membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), calcule chaque année l’effort réalisé par chacun compte tenu de ses ressources annuelles ou Revenu national brut (RNB). Selon ce critère, le meilleur donateur, au sein du G8, est la France : elle a consacré 0,36 % de son RNB à l’aide, contre une moyenne de 0,17 % pour le groupe. Et tous les pays du G8 sont loin d’atteindre l’objectif qu’ils ont approuvé… en 1972 (0,7 %). Depuis plus de trente ans, les promesses se suivent et se ressemblent. Le sommet d’Évian a ainsi rappelé les engagements pris lors du précédent, à Kananaskis (Canada, juin 2002). Il pourrait en être de même lors du prochain, prévu en 2004, aux États-Unis.
Et il faudra sans doute attendre encore longtemps avant de voir l’un des membres du G8 égaler les performances du Danemark. Ce dernier a été, le 26 mai, félicité par ses pairs pour la « générosité de son aide et son esprit d’innovation au niveau de la politique et de la gestion de sa coopération pour le développement ». Et ce malgré un fléchissement du volume de son aide (- 6,4 % en termes réels). Dans l’ensemble, le CAD a estimé que le programme du Danemark est un de ceux qui obéissent le mieux aux critères de l’OCDE. Copenhague cible son aide sur un nombre restreint de pays et de secteurs. Trois États ont ainsi été rayés de la liste des bénéficiaires pour mauvaise gouvernance et non-respect des droits de l’homme : l’Érythrée, le Malawi et le Zimbabwe.
Les louanges que reçoit le Danemark s’expliquent par le fait qu’il est celui qui réalise le plus gros effort en la matière : il a consacré 0,96 % de ses ressources en 2002 à l’aide au développement, alors que l’ensemble des vingt-deux pays riches ne réalise que 0,23 %. Quatre autres seulement dépassent le niveau requis de 0,7 % : la Norvège, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suède.
La politique des pays riches favorable à une relance de l’aide s’est concrétisée avec une progression de 52,3 milliards de dollars en 2001 à 57 milliards de dollars l’année suivante. Mais si l’aide fournie en 2002 par le CAD retrouve son niveau d’il y a dix ans, elle reste inférieure en termes d’effort : 0,23 % du RNB en 2002, contre 0,33 % en 1992. Cette différence de 0,10 % représente un manque de 25 milliards de dollars.
Les promesses faites lors de la conférence des Nations unies de Monterrey sur le financement du développement (Mexique, mars 2002) et reprises depuis par toutes les instances internationales jusqu’au dernier sommet du G8 méritent d’être relativisées : selon les prévisions de l’OCDE, si elles sont tenues, l’aide augmentera de 16 milliards de dollars pour atteindre, en 2006, 73 milliards en termes réels, soit 0,26 % du RNB, toujours moins qu’en 1992. Seuls trois pays se sont engagés à faire beaucoup mieux en réalisant enfin l’objectif de 0,7 % : l’Irlande en 2007, la Belgique en 2010 et la France en 2012 (Jacques Chirac l’a confirmé le 2 juin avec une étape intermédiaire de 0,5 % en 2007). Une belle progression en perspective, ces trois pays étant aujourd’hui respectivement à 0,41 %, 0,42 % et 0,36 %.
Les États-Unis, qui ont repris au Japon la position de leader en valeur absolue, sont toujours derniers en valeur relative. Leur aide a progressé de 11,4 milliards de dollars en 2001 à 12,9 milliards en 2002, grâce aux effets « positifs » des attentats du 11 septembre 2001 (la pauvreté reconnue comme une des causes du terrorisme), et devrait être portée à 15 milliards en 2006. Mais elle reste très conditionnelle, réservée à certains pays et à quelques secteurs. En termes d’effort, elle ne devrait pas décoller du 0,12 % du RNB américain, le taux le plus faible du CAD. L’aide du Japon, deuxième donateur, a diminué parallèlement à la crise économique que connaît le pays (de 15,3 milliards de dollars en 1999 à 9,2 milliards en 2002), mais elle reste stable (0,23 % du RNB). Aucune promesse à l’horizon, sauf peut-être lors de la IIIe Conférence internationale de Tokyo sur le développement africain (Ticad III, à la fin septembre 2003). Autres annonces faites à Évian : l’aide du Royaume-Uni passerait de 0,3 % en 2002 à 0,4 % en 2006, celle de l’Italie de 0,2 % à 0,33 %, et celle de l’Allemagne de 0,27 % à 0,33 %. Le Canada a promis de doubler son aide d’ici à 2010.
Quels en seront les bénéficiaires ? Les pays africains reçoivent le tiers de l’aide mondiale, mais relativement moins que les pays de l’Europe de l’Est : 20 dollars en moyenne par Africain, contre 25 dollars par Est-Européen. Le cas exceptionnel de l’Océanie (212 dollars par tête) s’explique par la faiblesse de la population des territoires concernés ou par leur rattachement à une métropole (Nouvelle-Calédonie, îles Marshall…). À Évian, il a été décidé que l’Afrique profitera au moins de 50 % des augmentations promises d’ici à 2006, soit un apport de 6 milliards de dollars, l’aide du G8 au continent passant de 10 milliards à 16 milliards !

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