Pari sur le gaz

En dix ans, les parts respectives du pétrole et du gaz se sont inversées. Les autorités tablent sur ce dernier pour réduire la facture énergétique.

Publié le 11 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

Le fait le plus marquant est sans conteste l’inversion des parts respectives du gaz et du pétrole. La production de gaz – le principal gisement, Miskar, se trouve dans le golfe de Gabès – est passée de 1 million de tep en 1991 à 3,03 millions de tep en 2001. Sur la même période, celle de pétrole – essentiellement concentrée dans les champs d’El Borma, au Sud, et d’Ashtart, dans le golfe de Gabès – a chuté de plus de 5 millions de tonnes à 3,4 millions de tonnes. Pour le gouvernement tunisien, l’équation est simple : d’un côté, un solde énergétique négatif (- 530 000 tep en 2001) et une consommation qui augmenterait de 5 % par an ; de l’autre, une ressource naturelle dont le développement devrait permettre de réduire la facture des importations (83 millions de DT en 2001, par exemple).
Dès 1999, le code des investissements avait été amendé pour offrir davantage de flexibilité aux opérateurs gaziers. L’effort poursuivi est perceptible dans le Xe plan quinquennal (2002-2006), qui prévoit que l’État doit engager 2,2 milliards de dinars tunisiens (1,5 milliard d’euros) pour les seuls secteurs du gaz et de l’électricité, contre 1,5 milliard de DT dans le plan précédent. Il lui reste à mobiliser les opérateurs privés, notamment en leur proposant des partenariats. Pour soutenir cette politique, il se consacrera pour sa part prioritairement au transport et à la distribution de gaz naturel à travers le pays. En redimensionnant ses infrastructures, la Tunisie souhaite également jouer la carte du pays de transit et profiter de sa situation géographique qui la place entre producteurs et consommateurs d’énergie pour exporter davantage vers l’Europe, comme elle le fait déjà pour le gaz algérien destiné à l’Italie. À titre d’exemple, d’importants projets de gazoduc et d’oléoduc avec la Libye doivent voir le jour d’ici à 2006. Le réaménagement des installations devra par ailleurs permettre de rapprocher les champs de production du Sud tunisien des grands bassins de consommation du Nord, et de diminuer la dépendance au gaz algérien.
Enfin, les ressources gazières doivent servir à produire cette électricité qui fait parfois défaut au pays. C’est dans ce domaine, libéralisé en 1996, qu’a été lancée la première opération de concession en Tunisie. Le consortium anglo-américano-nippon CPC (Carthage Power Company), créé pour l’occasion, s’est vu confier pour vingt ans l’exploitation de la centrale de Radès, dans la banlieue de Tunis. D’une puissance de 471 mégawatts, sa construction aura coûté 375 millions de DT. Elle est entrée en production en mai 2002. L’électricité qui en sort est destinée uniquement au réseau intérieur, géré par la Société tunisienne d’électricité et de gaz (Steg). Le gouvernement travaille déjà, sur ce principe, à la réalisation d’une centrale électrique dans la région de Sfax (voir encadré p. 59), dotée d’une puissance de 350 à 500 MW, et pense également concéder une première raffinerie de pétrole à Skhira, le long du golfe de Gabès. Reste, là encore, à trouver les opérateurs.
Ce pari sur le gaz ne signifie pas pour autant que l’État renonce à relancer l’exploration pétrolière onshore ou offshore et à attirer les investisseurs privés. Lui-même engagera 1,8 milliard de DT dans le cadre du Xe plan, et un régime fiscal attractif a été mis en place. Les opérateurs privés ont ainsi le choix entre plusieurs types de contrats de production, leurs bénéfices sont non imposables à condition d’être réinvestis dans le secteur, et les redevances dues sont ajustables en fonction de la taille et de la rentabilité du gisement. Malgré ses faibles réserves en hydrocarbures (120 millions de tep prouvées), la Tunisie a conservé l’intérêt des compagnies pétrolières. Le pays en accueille 41 aujourd’hui – près de la moitié sont américaines -, contre 27 en 1990. « Même si nos gisements ne sont pas très importants, nous présentons des taux de découverte qui satisfont les compagnies de petite taille », observe-t-on au ministère. Le secteur des hydrocarbures attire ainsi chaque année entre 30 % et 45 % des investissements directs étrangers. Soit, pour 2002, le record de 427,5 millions de DT. « Cela dépend bien sûr de la conjoncture et de la demande », constate Abdelaziz Rassaa, pour qui « il existe encore des champs prometteurs, à condition de forer plus profond, ce qui demande donc des moyens plus importants ». Et un cadre toujours plus incitatif…

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