Bénin : décès de Vincent Foly, « doyen » respecté de la presse
La mort du journaliste Vincent Foly, emporté par le Covid-19 le 3 septembre, a déclenché une vague d’hommages unanimes à l’endroit de cette grande voix du journalisme, « inlassable militant de l’idéal démocratique ».
La nouvelle de la mort de Vincent Foly est tombée vendredi 3 septembre dans la soirée. Atteint de Covid-19, le journaliste de 68 ans, promoteur de La Nouvelle Tribune, est décédé à Allada, non loin de Cotonou. Il était hospitalisé dans le centre de traitement consacré aux personnes souffrant des formes les plus graves de la maladie.
Un mois seulement après la levée de la sanction qui interdisait la parution de son journal, celui que l’on surnommait le « doyen » ne sera donc malheureusement pas témoin du come-back tant attendu de son titre dans les kiosques, qu’il préparait depuis des semaines.
Bras de fer avec la justice
Enseignant de formation, Vincent Foly a exercé ce métier pendant plusieurs années avant de bifurquer vers le journalisme. Il en gravit les échelons en travaillant pour des quotidiens de la place. En 2001, il fonde La Nouvelle Tribune, qu’il dirigera et par lequel il se révèlera. Connu pour son franc-parler et son attachement à ses convictions, Vincent Foly est rarement complaisant avec les milieux politiques. Les présidents béninois successifs en font les frais et la publication est souvent taxée d’appartenir à l’opposition.
Ces dernières années, La Nouvelle Tribune a payé le prix fort pour l’engagement de son patron. En 2018, le régulateur des médias en a suspendu la parution. La Haute Autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) reproche à l’organe de presse la publication d’une série de propos jugés injurieux à l’endroit du chef de l’État, Patrice Talon. À l’époque, la décision avait été critiquée par les associations professionnelles du secteur.
Vincent Foly était juste un homme qui ne pouvait pas se taire devant l’injustice
Tenace, Vincent Foly avait attaqué la décision devant les juridictions, contre l’avis d’autres professionnels. « Pour certains, c’était un opposant téméraire, mais en vérité, Vincent Foly était juste un homme qui ne pouvait pas se taire devant l’injustice, un homme qui voulait que chaque action soit sur une base légale et non arrangée », commente son fils, Euloge, qui gère la version numérique du journal.
Foly finira par obtenir gain de cause au cours du procès en appel : en mai 2019, la Haac est contrainte de lever l’interdiction de publication qu’elle faisait peser sur le journal. Mais c’est seulement au début d’août 2021 que le régulateur va décider de lever la sanction.
Hommages unanimes
Depuis l’annonce de sa disparition, les hommages pleuvent de part et d’autre. Intellectuels, politiques et journalistes qui ont côtoyé Vincent Foly ont salué un homme de conviction respecté pour son combat en faveur de la démocratie. L’ancien président Thomas Boni Yayi fait partie des premières personnalités politiques à avoir réagi. Pour lui, le décès de Vincent Foly est une « grosse perte pour la République et le peuple béninois ». Ce dernier s’était « investi totalement, avec courage et abnégation, dans la restauration et l’approfondissement de la démocratie et de l’État de droit de la personne humaine », a ajouté l’ancien chef d’État.
L’écrivain Florent Couao-Zotti – également conseiller technique de Jean-Michel Babalola Abimbola, le ministre de la Culture –, a bien connu Vincent Foly, qui lui ouvrait souvent les colonnes de son journal pour qu’il y publie ses chroniques. « Il avait tendance à défendre le petit peuple, écrit-il à propos du disparu. Il avait en sainte horreur les puissants, riches et politiques ayant tendance à abuser de leurs pouvoirs pour opprimer le peuple. »
La démocratie pleure un brave combattant
De nombreux acteurs des médias ont également salué le professionnalisme et l’attachement à la démocratie de Vincent Foly. Le journaliste et universitaire Francis Laloupo salue un « bel esprit » et un « inlassable militant de l’idéal démocratique ». Pour Déo Gratias Kindoho, ancien journaliste à la radio nationale, « la presse béninoise perd un de ses plus solides piliers » à travers la disparition de Vincent Foly, et « la démocratie pleure un brave combattant ».
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