Et la lumière fut

Alimenté par la centrale hydroélectrique malienne de Manantali, un poste à haute tension a été inauguré, le 20 mai, à Nouakchott.

Publié le 10 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

Nouakchott, 20 mai 2003. Les présidents Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya (Mauritanie), Abdoulaye Wade (Sénégal), Amadou Toumani Touré (Mali) et le Premier ministre guinéen, Lamine Sidimé, affichent des mines ravies en inaugurant un poste à haute tension. Car il ne s’agit pas d’un équipement quelconque. L’électricité y arrive après un parcours de quelque 1 500 km à travers le territoire sénégalais. Car celle-ci est produite à la centrale hydroélectrique du barrage de Manantali, construite sur le Bafing, un affluent du fleuve Sénégal qui coule au Mali, et qui dispose d’une puissance installée de 200 mégawatts. Sur les 800 gigawattheures générés chaque année par la centrale, mise en service l’an dernier, la Mauritanie reçoit 15 % (le Sénégal 33 % et le Mali 52 %). Nouakchott est éclairé par Manantali depuis le 15 novembre 2002, mais il a fallu attendre la tenue de ce XIIIe Sommet de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) pour marquer symboliquement l’événement.
Réunis dans ce cadre, les trois chefs d’État et leur invité guinéen ont salué cette réalisation comme une véritable victoire. Et d’ajouter que l’OMVS prouve qu’elle est « un instrument exemplaire et une référence dans le domaine de l’intégration sous-régionale ». C’est l’Afrique, nous dit-on, qui réussit et qui avance. « À travers son réseau électrique interconnecté, a souligné le président Ould Taya, l’OMVS a réalisé l’un de premiers jalons du réseau proposé dans le cadre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) ».
C’est, à n’en pas douter, un grand projet pour la sous-région et les populations des trois pays traversés : 460 millions de dollars (390 millions d’euros), fournis par l’OMVS et dix bailleurs de fonds dont le principal est l’Agence française pour le développement (AFD). Les lignes électriques sont doublées d’un câble de garde en fibres optiques capable de transmettre plus de 30 000 communications téléphoniques simultanées, l’Internet à haut débit et une cinquantaine de canaux de télévision.
L’arrivée de cette énergie va avoir des effets socio-économiques multiples pour la Mauritanie. Le raccordement offre de nouvelles potentialités énergétiques à Nouakchott et aux principales villes du pays, et surtout à celles situées dans la région du fleuve Sénégal. Des études sont en cours en vue de connecter les zones situées le long de la ligne électrique, dans les wilayas du Gorgol, du Brakna et du Trarza. Ce qui devrait permettre d’augmenter les superficies irriguées grâce au pompage électrique à partir du fleuve Sénégal. L’électricité permettra, entre autres, d’installer des industries agroalimentaires dans la vallée du fleuve. Il s’agit en somme d’une révolution pour l’agriculture dans ces régions.
Manantali va satisfaire près de 25 % des besoins prévisionnels de la Société mauritanienne de l’électricité (Somelec) à l’horizon 2010. Elle va notamment lui permettre de réaliser son programme visant le raccordement de toutes les cités de plus de 5 000 habitants. La facture des importations pétrolières, qui s’est élevée, en 2001, à 95 millions de dollars devrait être réduite d’environ 20 %. En effet, jusque-là, l’électricité était produite par les centrales thermiques de la Somelec qui fonctionnent avec du fuel importé.
Pour les abonnés, la facture devrait être réduite de 5 % à 10 %. L’énergie de Manantali devrait aussi « doper » la Somelec, dans la mesure où la société doit être privatisée. Cette valorisation va-t-elle la rendre plus attrayante vis-à-vis des partenaires stratégiques recherchés ? Une première tentative de cession de 51 % de son capital, en avril 2002, n’avait pas suscité beaucoup d’intérêt. Sur les cinq grandes compagnies préqualifiées à la suite d’un appel d’offres, une seule, l’Office national d’électricité marocain (ONE), avait offert 10,5 millions de dollars. Montant jugé insuffisant dans la mesure où la banque d’affaires HSBC, qui avait conseillé le gouvernement mauritanien, l’avait évaluée à pas moins de 20 millions de dollars.
Pour les experts de la Banque mondiale, le marché international de l’énergie était à l’époque défavorable. Ils envisagent maintenant d’aider la Mauritanie à relancer le processus de privatisation en 2004.

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