Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 9 mai 2005 Lecture : 7 minutes.

Juifs tunisiens : faire la lumière
Je vous remercie vivement pour l’article paru dans Jeune Afrique/l’intelligent n° 2311 concernant mon livre Feuilles d’exil. Étant, comme vous le savez, un militant convaincu de l’amitié judéo-arabe, je considère que les frères que nous sommes se doivent la vérité, toute la vérité. Il y a un fait historique, aussi brutal que réel, dont effectivement il serait intéressant d’analyser les causes profondes. Fawzia Zouari pose en effet cette naïve question : « L’on se demande quelle menace concrète pesait tant sur les Juifs tunisiens pour qu’ils décident de partir ? » La quasi-totalité des Juifs des pays arabes a été amenée – d’une façon ou d’une autre – à quitter son pays natal. Je me réjouis – tout comme vous – de la permanence d’une petite communauté juive en Tunisie, mais elle ne représente qu’à peine 1 % du nombre que nous étions il y a cinquante ans…. Il faut tout de même rappeler que la présence juive en Tunisie est bien antérieure à l’arrivée des Arabes.
Si l’on veut préserver l’avenir, et on le doit, il faut faire toute la lumière sur le passé. Un journal aussi important que le vôtre, dont la judicieuse devise est « Le devoir d’informer, la liberté d’écrire », pourrait éclairer ses lecteurs pour le plus grand bien de tous.
Docteur André Nahum,
Sarcelles, France

Ce référendum n’est pas notre affaire
En tant que lecteur marocain de Jeune Afrique depuis vingt-six ans, je suis déçu par ce que j’ai lu dans l’un des derniers « Post-scriptum » (voir J.A.I. n° 2310). Votre publication est internationale et, à mon avis, vous n’avez pas à lancer des appels à voter oui ou non, quel que soit le scrutin. Même si je vis en France depuis trente-cinq ans, ce que les Français vont faire, dans l’isoloir, n’est pas mon affaire.

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Et la Palestine ?
Mais pourquoi diable les Arabes sont-ils aussi inertes et indifférents vis-à-vis de leurs semblables palestiniens ? En Égypte, des centaines de milliers de gens ont accompagné la star de cinéma Ahmed Zaki (voir « Adieu » dans J.A.I. n° 2308) à sa dernière demeure, mais personne n’a bougé lorsque Sharon et Bush ont décidé le non-retour aux frontières de 1967, prétexte pour isoler Jérusalem du reste de la Cisjordanie et l’annexer définitivement. L’esplanade des Mosquées est propriété de tout le monde musulman ! Portons le fardeau ensemble !
Dr. Samir Doghri, Saint-Louis, Sénégal

Patriotisme : oui ; nationalisme : non
Un de vos correspondants (J.A.I. n° 2300) prône le nationalisme pour la Côte d’Ivoire, regrettant que l’ancien président l’ait étouffé. Mais, du temps de Félix Houphouët-Boigny, ce pays vivait dans la paix, la prospérité, il était accueillant aux étrangers, qui y travaillaient paisiblement pour le bien du pays. Il faut savoir que le patriotisme (ancestral) est générateur d’amour, de paix ; il est ouvert, rassembleur, tolérant, tandis que le nationalisme est générateur d’exclusion, de haines, de guerres, parce que les « nations », en Afrique, pour beaucoup, sont artificielles : elles ont été « arrangées » par les puissances coloniales, qui ont fixé des frontières partageant souvent très mal les réalités ethniques. Le nationalisme exclusif est dangereux. L’Histoire nous enseigne à quelles épouvantables extrémités il peut arriver. Souvenons-nous que le mot « nazi » est une abréviation de « nazionalsozialismus ».

Côte d’Ivoire : tout ça pour ça
Le 26 avril, à six mois de la présidentielle, le président Gbagbo a accepté qu’Alassane Ouattara se présente à l’élection s’il le désire. Étions-nous obligés de passer par un coup d’État militaire, plusieurs autres tentatives et une guerre pour arriver à cette solution que tout le monde savait la meilleure ? Si la paix en Côte d’Ivoire doit passer par une candidature du leader du Rassemblement des républicains, alors, frères et soeurs ivoiriens, acceptons-la, que le meilleur gagne et que le vaincu reconnaisse sa défaite devant ses partisans, devant tout le peuple ivoirien, et enfin devant la communauté internationale qui devra jouer le rôle d’arbitre.
Yanourga Moussa Sanogo, Villemomble, France

Une seule nation arabe
À la suite de la lettre intitulée « Le Maroc n’est pas né en 1962 » (voir J.A.I. n° 2311), je voudrais rappeler que les peuples algérien et marocain et, au-delà, ceux du monde arabe dans son ensemble sont, en réalité, une communauté unique (Oumma). Les frontières héritées des colonisateurs ne devraient pas attiser l’animosité. Les Arabes devraient s’aimer davantage et oublier leur fâcheuse habitude de défendre, de manière égoïste, leur pays natal. Je suis algérien, certes, mais surtout arabe et fier de l’être. Oui, la nation arabe a une grande histoire. Il faut la connaître et en parler, car, contrairement à ce que l’on pense communément, des discussions et des échanges d’expériences jaillit la lumière, celle qui permettra le développement dont nous avons tant besoin. L’orgueil n’est pas un bon allié et le pardon est une véritable richesse.

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D’Abidjan à Lomé
Quelques jours après l’éclatement de la crise politique au Togo, j’ai fait le rapprochement entre la situation de ce pays et celle de la Côte d’Ivoire. Mieux : il existe un parallèle entre quatre hommes : Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara du côté d’Abidjan et Faure Gnassingbé et Gilchrist Olympio à Lomé. J’en conclus que la solution aux deux crises passe par la réconciliation à l’intérieur de ces deux « couples » antagonistes. L’initiative du président Olusegun Obasanjo, comparable celle du président Thabo Mbeki, a semblé me donner raison.

Fumée blanche et pape noir
Je n’ai jamais su que la fumée blanche était meilleure que la fumée noire. En tout cas, lors du conclave pour la nomination du Saint-Père, toutes les têtes bien pensantes avaient compris que l’élection d’un pape noir n’était pas envisageable. Car le noir, symbole d’échec, de deuil, de malheur et surtout de pauvreté et de saleté ne peut être annonceur d’une bonne nouvelle.
Depuis la révélation par les religions monothéistes d’un Dieu blanc par des prophètes blancs, l’existence d’une divinité noire ou d’un chef d’Église universelle noir est impensable. Quand c’est l’Église catholique qui affirme publiquement que le Bien ne peut uniquement venir que de ce qui est blanc, il y a de quoi s’interroger sur l’avenir des Noirs dans la communauté catholique universelle.
Heureusement que dans certaines contrées du continent africain on continue à vénérer cette belle couleur noire, « qui est la couleur de tous les temps », comme le dirait l’écrivain ivoirien Bernard Dadié. C’est le cas des Diolas de Casamance, au sud du Sénégal, où les nouveaux circoncis, à la sortie du bois sacré, sont habillés en noir, symbole de richesse, de pureté et de sagesse…
Moussa Goudiaby, Rabat, Maroc

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Normalité à l’africaine
Ce qui se passe au Togo et en Guinée n’est qu’un chapitre banal de la chronique de la normalité à l’africaine. Il est tout à fait normal, pour une frange de Togolais, qu’un fils soit élu pour succéder à son père après s’être cru en droit – de naissance – de régner, sans autre forme de procès, à la tête d’un État supposé moderne. Ou, pour des Guinéens, que le chef de l’État en dirige les affaires assis dans son command car. Ailleurs, un chef d’État grabataire aurait été destitué. Des gens d’Église réclamant la démission – à défaut de pouvoir le destituer – du pape Jean-Paul II au plus fort de sa maladie, c’était normal selon leur mode de pensée.
Imaginons un seul instant Mitterrand mourant au pouvoir et l’un de ses fils fonçant à l’Élysée pour s’autoproclamer président de la République française. Il se serait, illico, retrouvé à l’hôpital psychiatrique. Pour schizophrénie. En Afrique, il se serait trouvé un général pour brûler la cervelle au médecin du Samu et au capitaine des pompiers qui l’y auraient conduit. Pour manque de cervelle précisément. Qui a parlé d’« exception culturelle » ?

Nouvelle rébellion au Tchad
L’est du Tchad est, depuis toujours, une région d’où émergent les mouvements armés. En sont issus Hissein Habré, puis Idriss Déby, tous deux devenus chefs de l’État. La présence d’une nouvelle rébellion dans la zone ne surprend donc personne. Elle résulte, dans une large mesure, de frustrations politiques individuelles mais aussi de la libre circulation des armes à feu, hors du contrôle du pouvoir.
Les responsables politiques se montrent de plus en plus irrités, et les rapports avec le Soudan voisin se tendent. De part et d’autre de la frontière, les accusations fusent. Le Soudan croit de plus en plus à l’ingérence tchadienne dans le conflit du Darfour ; les Tchadiens soupçonnent leur voisin d’avoir fomenté l’actuelle rébellion.
Pour éviter l’enlisement, il est important de maintenir le dialogue à la fois entre les deux pays et entre les Tchadiens eux-mêmes. Le communautarisme et le repli sur soi menacent l’équilibre social. Ils risquent de compromettre la cohésion nationale.

Une occasion en or
Je pense que l’Église catholique a raté une occasion en or de se racheter : elle aurait dû élire un pape négro-africain. Parce que les souffrances de l’Afrique noire dans les siècles passés (esclavage, atrocités coloniales…) ont été infligées par les Européens avec la bénédiction et le mutisme de l’Église de l’époque. Félix Houphouët-Boigny, bâtisseur de la cathédrale de Yamoussoukro, aurait été heureux dans sa tombe !
Thierry Angrand, Thiès, Sénégal

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