Matières premières : « Le roman noir »

Publié le 9 mai 2005 Lecture : 2 minutes.

Le commerce équitable a le vent en poupe. Toute une série de manifestations sont organisées, depuis le 30 avril et jusqu’au 15 mai, dans les principales villes de France pour sensibiliser le grand public à ce mouvement de solidarité qui consiste à acheter un produit à une valeur jugée « plus conforme » à la sueur dépensée par les agriculteurs dans leurs champs (voir pages 82-83). Porté par l’Église catholique et des associations, ce nouveau mode de consommation ne doit pas faire oublier « le roman noir des matières premières »*. Le commerce équitable n’est, en effet, que d’un maigre secours dans la lente dégringolade des prix des produits agricoles qui affame la paysannerie des pays les plus pauvres. À en croire le dernier rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sur la question, les choses ne vont pas aller en s’arrangeant… pour la simple raison que les politiques de développement menées tant au Nord qu’au Sud ne font qu’aggraver la situation des économies qui dépendent d’un ou de deux produits agricoles : le café représente 75 % de la valeur des exportations du Burundi, et le coton 55 % de celle du Burkina.
Le vent de mondialisation et de libéralisation des échanges qui souffle sur la planète renforce chaque jour davantage la mainmise des groupes de négoce et de l’agroalimentaire des pays riches sur le commerce mondial. Ces derniers se taillent la part du lion des marges de transport, de transformation et de commerce des produits de base et concourent à maintenir – et bien souvent à accentuer – la situation de précarité des pays pauvres, notamment en Afrique. La dégradation des termes de l’échange est particulièrement inquiétante. Le prix des principaux produits de base a été divisé par quatre depuis les années 1960. Le cas du café, dont le marché connaît une offre surabondante, est symptomatique. En brousse, on achète les cerises de robusta en moyenne à 100 F CFA le kilo, alors que quatre sachets de café torréfié de 250 g valent plus de 12 euros (6 500 F CFA) chez l’épicier parisien.
Qui sont les responsables d’un tel déséquilibre ? En partie les pays riches, qui ont instauré, à travers les institutions de Bretton Woods et l’Organisation mondiale du commerce (OMC), un environnement et des règles du jeu favorables au développement de leurs entreprises. Mais aussi les dirigeants des pays africains, qui n’ont pas su anticiper les évolutions commerciales internationales et développer des industries secondaires capables de valoriser les ressources nationales. Et qui ont préféré assurer leurs vieux jours.

* Sous-titre de l’ouvrage de Jean-Pierre Boris, Commerce inéquitable (Hachette Littératures, mai 2005).

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