Touche pas à mon turban !

Le projet de loi visant à interdire le port de signes religieux « ostensibles » à l’école a été élaboré sans consulter la communauté sikh, qui s’indigne.

Publié le 10 février 2004 Lecture : 2 minutes.

Rebondissement inattendu dans l’affaire des signes religieux « ostensibles » à l’école. La communauté sikh, qui compte environ dix mille fidèles dans l’Hexagone, s’est rassemblée le 31 janvier à Paris pour faire part de son indignation face à ce projet de loi. « Le turban est une partie de notre corps », « pas de turban = pas de liberté » annonçaient les pancartes des manifestants qui ont défilé dans les rues parisiennes, enturbannés de drapeaux tricolores. Plusieurs centaines de Sikhs résidant dans les pays européens voisins étaient venus grossir les rangs des protestataires.
Laissés jusqu’à présent à l’écart du débat sur la laïcité, les Sikhs de France tentent à présent de se faire entendre. Ils se plaignent de ne pas avoir été consultés par la commission Stasi dans le cadre de la réflexion préalable à un projet de loi qui les concerne, leur religion imposant aux hommes de porter un turban. Ou du moins de ne pas couper leurs cheveux.
« Le turban que nous portons n’est pas un signe religieux, mais avant tout un rite profondément ancré dans notre tradition », explique Karmvir Singh, l’un des organisateurs de la manifestation. Pourtant, certains membres de la communauté affirment que le port du turban est un devoir sacré. Et refuse à ce titre de le retirer.
Au-delà de ces querelles théologiques, les Sikhs expliquent ne pas comprendre l’attitude du gouvernement français. « Nous ne faisons rien de mal » s’étonne Chain Singh, responsable de l’Association du culte sikh en France, avant d’ajouter que le port du turban n’a jamais causé de problèmes à la communauté dans les autres pays. « Au Royaume-Uni, au Canada ou aux États Unis, les Sikhs qui travaillent dans la police ou dans les forces armées sont autorisés à porter leur turban en tant qu’élément de l’uniforme. »
Cette association, qui gère un temple dans la banlieue nord-est de la capitale, a écrit début janvier au président Jacques Chirac pour lui demander d’intercéder en sa faveur. Et de ne pas interdire le port du turban à l’école. La lettre se permet de rappeler au bon souvenir du président que des Sikhs se sont battus aux côtés de la France contre l’armée allemande pendant la Première Guerre mondiale… sans que personne ne leur demande de retirer leur turban ! Pour l’instant, cette demande est restée sans réponse. De son côté, le ministre de l’Éducation nationale Luc Ferry a suggéré le port d’un turban… « invisible » !
« Si nous n’obtenons pas gain de cause, nous partirons », affirme Chain Singh. La plupart des Sikhs de France sont arrivés dans les années 1980, au moment où ils étaient victimes de persécutions en Inde. Aujourd’hui, ils vivent majoritairement dans le département de la Seine-Saint-Denis, près de Paris, où de nombreux établissements scolaires autorisent le port du turban sans que cela ne soulève de protestations. Mais le projet de loi sur la laïcité, actuellement débattu à l’Assemblée nationale, pourrait peut-être conduire les plus pratiquants à prendre une nouvelle fois le chemin de l’exil !

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