RDC : « Les journalistes congolais ne sont pas des criminels »

Les violences policières subies le 15 septembre par Patient Ligodi, correspondant de RFI, et quelques-uns de ses confrères témoignent d’une dérive autoritaire insupportable, dénoncent plusieurs personnalités de la société civile congolaise.

Patient Ligodi est correspondant de RFI. © Gwenn Dubourthoumieu pour JA

Patient Ligodi est correspondant de RFI. © Gwenn Dubourthoumieu pour JA

Publié le 18 septembre 2021 Lecture : 3 minutes.

Tribune. Les faits se sont déroulés le mercredi 15 septembre dans le district de la Tshangu, à Kinshasa. Alors qu’ils couvraient la marche de Lamuka, des journalistes ont été arrêtés et brutalisés par les forces de l’ordre. Des policiers visiblement dépêchés sur les lieux dans le seul but de réprimer violemment la manifestation.

Bavures à répétition

Ainsi, alors qu’il réalisait une interview de Martin Fayulu, Patient Ligodi, directeur général d’Actualité.CD et correspondant de RFI, a été tabassé avant d’être traîné sur le sol et emmené dans une jeep vers le centre-ville. Après cette brutale et sauvage interpellation, le journaliste a été relâché.

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Cette bavure policière n’est pas un acte isolé. Elle intervient après une série d’actes similaires dirigés non seulement contre la presse, mais aussi contre les militants des droits humains et les membres de mouvements citoyens. Elle rappelle amèrement toutes celles qui ont récemment eu lieu à Kinshasa et à travers le pays et met en lumière une volonté de répression systématique des Congolais. Certaines ont même entraîné la mort de citoyens dont le seul crime aura été le non-respect des gestes barrières.

Manifester pour se faire entendre dans le respect des règles n’est en aucun cas un crime !

Cela est en contradiction avec le discours sur l’État de droit tant prôné par le président Félix Tshisekedi à son arrivée au pouvoir, en 2019.

Démocratie en péril

La liberté de la presse est le baromètre idéal pour mesurer la démocratie dans un pays. Au regard de ce qui se passe actuellement en RDC, tout porte à croire que la démocratie est en péril, ce qui laisse présager une aggravation de la situation à l’approche des prochaines élections, prévues en 2023.

Ce qui s’est passé ce 15 septembre devrait interpeller tous les citoyens que nous sommes et rappeler à nos politiques – ainsi qu’à nos forces de l’ordre que manifester est un droit fondamental. Réprimer, tabasser, agresser, voler, insulter sont des comportements inadmissibles et contraires à nos lois.

Nous appelons le gouvernement à punir toute la chaîne de commandement qui a contribué à la répression

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Il y a moins de deux ans, le pouvoir actuellement en place était de l’autre côté de la barrière. Comment comprendre qu’il tolère ces comportements violents ? Être dans l’opposition, manifester pour se faire entendre dans le respect des règles n’est en aucun cas un crime ! Empêcher un journaliste de faire son travail, s’en prendre aux activistes qui dénoncent les actes illégaux ou à la population qui manifeste pacifiquement constituent des comportements propres à un régime autoritaire. Les autorités de la République ne doivent pas cautionner et encourager de tels actes. Le président, le gouvernement, les forces de l’ordre sont chacun comptables de leurs comportements et devront tôt ou tard en répondre.

Acte de trahison

Il est temps que ces actes cessent définitivement. C’est pourquoi, tout comme les correspondants congolais de la presse internationale, nous appelons le gouvernement à punir, pour l’exemple, toute la chaîne de commandement qui a contribué à la répression du 15 septembre. La politique du bouc émissaire n’est plus acceptable. Les policiers doivent être formés à la protection des civils et à l’encadrement des manifestations pour préserver l’ordre public. Les biens volés doivent être restitués, les préjudices causés à toutes les victimes de cette manifestation, réparés.

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Il est essentiel que notre pays et nos autorités respectent les droits humains et la liberté de la presse. C’est le minimum que l’on espère d’un régime qui, dans un passé proche, a été victime de l’arbitraire. Le contraire constitue un acte de trahison non seulement envers le peuple mais aussi à l’égard de ses propres valeurs. La RDC mérite mieux et nos journalistes doivent être respectés et protégés.

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