Tous aux urnes !

La victoire du « oui » au référendum de décembre donne le coup d’envoi du marathon électoral.

Publié le 9 janvier 2006 Lecture : 3 minutes.

A 73 ans, Étienne Tshisekedi n’a rien perdu de sa fougue. Ce vétéran de la scène politique congolaise repart au combat avec une détermination comparable à celle qu’il affichait aux plus belles heures du mobutisme. Le 2 janvier, le « Sphinx de Limete » a annoncé que son parti, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), participera aux prochaines élections. Une manière pour le premier mouvement d’opposition de prendre en marche le train de la Transition, que semble désormais cautionner la majorité de la population congolaise. Qui veut en finir au plus vite avec ce régime provisoire.
Alors que l’UDPS avait jusqu’à présent boycotté le processus électoral, la victoire incontestable du « oui » (plus de 83 % des suffrages) à l’issue du référendum constitutionnel des 18 et 19 décembre dernier l’a obligé à tirer les leçons de ce plébiscite. Et à opter pour un changement radical de stratégie. En fait, les dirigeants tshisekedistes, comme bien d’autres, avaient sous-estimé les aspirations de la population. Après deux décennies de faillite et cinq années de guerre, la première consultation démocratique qu’a connue le pays depuis son accession à l’indépendance en 1960 est riche d’enseignements. À l’exception de la métropole de Kinshasa et des deux provinces du Kasaï, où l’UDPS est bien implantée, toutes les autres régions de RDC ont approuvé massivement le texte référendaire. Du Kivu au littoral atlantique, de l’Équateur au Katanga, les électeurs ont clairement manifesté leur lassitude. Ras-le-bol de la violence arbitraire perpétrée par les bandes armées, ras-le-bol des souffrances endurées et de la paupérisation galopante… Dans les régions de l’Est, les plus marquées par le conflit, la participation a été massive et le « oui » s’est imposé à 97,6 % au Sud-Kivu, 96,7 % au Nord-Kivu, 95,6 % au Maniema, 89,3 % au Katanga, et 86,2 % en Province orientale. Et là où l’on pouvait craindre que la question de la nationalité des Banyamulengues (minorité tutsie d’origine rwandaise implantée dans l’est du pays) susciterait un sentiment de rejet – notamment à Goma et à Bukavu -, le texte proposé a été approuvé.
Aujourd’hui plus que jamais, la population congolaise regarde donc dans la même direction. Et les politiciens ont compris le message : la Transition doit s’achever dans les temps, à charge pour la classe politique kinoise de tout mettre en oeuvre pour que les élections puissent se tenir avant le 30 juin 2006. Une exigence que partage la communauté internationale, lassée de porter à bout de bras ce laborieux processus.
C’est donc un véritable marathon électoral qui s’annonce. Concrètement, le nouveau président devrait entrer en fonctions le 25 juin prochain, selon le planning proposé par la Commission électorale indépendante (CEI). Il prévoit la tenue du premier tour de la présidentielle et des législatives le 9 avril. La proclamation des résultats du premier tour de la présidentielle est fixée au 27 avril, et celle des résultats du second tour au 12 juin.
Autant dire que le temps presse. C’est pourquoi, à l’instar de Tshisekedi, qui « entend conduire le peuple congolais, épris de paix et de changement, à la victoire finale lors des prochaines élections », les états-majors politiques sont en train d’élaborer leurs plans de bataille. Certains sont même déjà en campagne. Des membres influents du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) ont abandonné Jean-Pierre Bemba pour rejoindre Pierre Pay-Pay, ancien gouverneur de la Banque centrale du Zaïre sous Mobutu. À la tête de la Convention des démocrates congolais (Codeco), ce dernier semble déjà pouvoir compter sur le soutien du président de l’Assemblée, Olivier Kamitatu, et de l’ex-ministre José Endundo. En réaction, Bemba, actuellement vice-président de la République, pourrait être tenté de faire un ticket avec le chef de l’État sortant, Joseph Kabila. Quant à Tshisekedi, il semble maintenant décidé à descendre dans l’arène. Mais, après avoir prôné le boycottage, le patron de l’UDPS doit obtenir la réouverture des bureaux d’enregistrement des électeurs par la CEI s’il veut reprendre sa place sur l’échiquier politique. Il avait en effet exhorté ses fidèles à bouder le processus référendaire, refusant lui-même de se faire recenser. Si bien qu’il ne peut actuellement pas participer à la course à la présidentielle, puisqu’il ne peut même pas exercer son droit de vote.

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