Louis Armstrong, le Congo et le complot de la CIA
Lors de sa grande tournée africaine au début des années 1960, le trompettiste de jazz aurait été utilisé comme cheval de Troie par les services de renseignements américains.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 25 septembre 2021 Lecture : 2 minutes.
Assassinats ciblés, déstabilisation télécommandée, coups tordus ou mosaïque incongrue de mercenaires et de pouvoirs publics… À défaut d’être sur le coup éventés, les complots secrets de l’interventionnisme occidental finissent par être avoués. À condition d’être patient…
Prenons l’exemple de Louis Armstrong : ce n’est qu’en septembre dernier que le journal britannique The Guardian a dévoilé le rôle bien involontaire joué par le chanteur et trompettiste américain dans le Congo des années 1960. Aurait-il chanté What a wonderful world, en 1967, s’il avait compris ce qui s’était joué dans son dos quelques années plus tôt, à Léopoldville ?
Le 17 janvier 1961, le Premier ministre déchu Patrice Lumumba est assassiné après avoir été livré au gouvernement katangais de Moïse Tshombe. Au fil des ans, l’Histoire dévoilera qu’il a été tué par des responsables de la province congolaise séparatiste et des policiers belges. Larry Devlin, l’un des chefs de la CIA chargés de l’Afrique centrale, finira par reconnaître, lors d’une enquête du Congrès américain, que l’Agence était responsable du coup d’État d’un Mobutu peu suspect de sympathie pour le bloc soviétique.
Armstrong « horrifié »
Ce que révèle aujourd’hui le quotidien britannique, c’est que Washington aurait fortement incité Louis Armstrong à faire une grande tournée en Afrique, la CIA espérant en profiter pour infiltrer les instances politiques de pays nouvellement indépendants et, dans le cas du Congo, collecter des informations stratégiques sur la riche province du Katanga.
Louis Armstrong and the spy: how the CIA used him as a ‘trojan horse’ in Congo https://t.co/QQLbD3UF94
— The Guardian (@guardian) September 12, 2021
Deux mois avant le meurtre de Patrice Lumumba, Devlin dînait même avec le couple Armstrong dans un restaurant de Léopoldville, à un kilomètre et demi de l’endroit où Lumumba était retenu prisonnier. Ne pouvant entrer officiellement en contact avec le gouvernement autoproclamé katangais, l’agent de la CIA s’était présenté au trompettiste comme un simple attaché politique de l’ambassade américaine, désireux de faciliter sa tournée musicale. C’est sous le couvert de cet évènement qu’il aurait obtenu des informations stratégiques sur la province séparatiste. Autrement dit, Louis Armstrong a été utilisé comme « un cheval de Troie ».
À l’origine de ces nouvelles révélations, Susan Williams, chercheuse à la London University’s School of Advanced Study, affirme que l’artiste « aurait été horrifié » d’apprendre la manipulation, tant il était de tous les combats contre le racisme et l’impérialisme. Il sera à ce point marqué par son voyage africain que le Congo lui inspirera en partie la comédie musicale The Real Ambassadors.
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