Beyoncé et Jay-Z, les diamants noirs de Tiffany  

Soixante ans après Audrey Hepburn, le joaillier de luxe a choisi le couple de stars comme égéries. Objectif : conquérir une clientèle plus jeune, plus internationale, différente de sa cible blanche traditionnelle.

Beyoncé et Jay-Z en concert à Chicago, en 2018 Mandatory Credit: Photo by PictureGroup/REX/Shutterstock (9789151a)
Beyonce and Jay-Z
Beyonce and Jay-Z in concert, ‘On The Run II Tour’, Chicago, USA – 11 Aug 2018/
© PictureGroup/REX/Shutterstock/SIPA

Beyoncé et Jay-Z en concert à Chicago, en 2018 Mandatory Credit: Photo by PictureGroup/REX/Shutterstock (9789151a) Beyonce and Jay-Z Beyonce and Jay-Z in concert, ‘On The Run II Tour’, Chicago, USA – 11 Aug 2018/ © PictureGroup/REX/Shutterstock/SIPA

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  • François Thomas

    Journaliste, directeur de publication des magazines Brune et Ben, consultant spécialiste d’intelligence économique.

Publié le 28 septembre 2021 Lecture : 3 minutes.

Le 15 septembre dernier, les aficionados découvraient Beyoncé et Jay-Z en égéries du joaillier de luxe Tiffany & Co. Le couple d’icônes de la musique présentait « About love », la nouvelle collection de la maison. Elle, dans une robe noire signée Olivier Rousteing de Balmain, portant à son cou le diamant le plus célèbre du monde, le Tiffany Diamond (128,54 carats, 82 facettes). Lui, avec une coiffure rasta à la Basquiat, égratignant les codes du chic et du bon genre. Avec, en toile de fond, un tableau acquis par Bernard Arnault, patron du groupe, et jamais révélé au public, « Equals Pi », de Jean-Michel Basquiat, précisément, peintre disruptif décédé en 1988 et qui reste un des plasticiens africains-américains les plus cotés au monde.

Rap et ultra-luxe

En 1961, Audrey Hepburn avait tenu le même rôle que les Carter. On se souvient de la star hollywoodienne dans la première scène du film Diamants sur canapé. Vêtue elle aussi d’une délicate robe noire, le cou orné d’un quadruple rang de perles, elle admirait la vitrine du joaillier en soupirant : « Rien de mal ne pourrait vous arriver chez Tiffany ».

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Entrée dans le giron du groupe LVMH en 2019, la maison Tiffany, longtemps considérée comme faisant partie de l’establishment Wasp (blanc, anglo-saxon et protestant), tente de séduire une clientèle différente, plus jeune, plus internationale, dont il faut connaître les codes, les envies et les aspirations.

L’influence grandissante des icônes africaines-américaines se répercute sur la communication des grands du luxe

Soixante ans après Hepburn, des icônes noires prennent donc du service. Parce qu’elles peuvent se targuer de concentrer tous les atouts. Le monde de 2021 n’est pas celui des années 1960. Le mouvement Black Lives Matter, l’impact phénoménal des réseaux sociaux, la montée en puissance de la contre-culture, l’influence grandissante des icônes africaines-américaines et des acteurs culturels œuvrant dans l’univers musical ont des répercussions significatives sur les politiques de communication des grands du luxe. L’alliage de l’ultra-luxe et du rap, explosif et improbable hier, est gagnant sur les réseaux sociaux et dans les imaginaires biberonnés à internet. La campagne « About Love » créé ainsi un précédent. Chargé de rajeunir la marque, Alexandre Arnault, vice-président exécutif de Tiffany & Co, s’est dit honoré « que les Carter fassent partie de la famille Tiffany ».

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Une manne exceptionnelle

Faire partie de la famille… La formule est habile. Le luxe et les « rebelles » ont lié leur sort.  Si l’exercice n’est pas nouveau dans la mode ou la parfumerie, il est inhabituel dans la haute joaillerie, où les carats détestent sortir de leur zone de confort. Le groupe LVMH, qui possède 50  % des parts du champagne Armand de Brignac, propriété de Jay-Z, connaît bien le rappeur et n’a pas eu trop de difficultés à convaincre le couple de milliardaires adulé aux quatre coins du globe. Beyoncé est suivie par 200 millions de followers sur Instagram. Une manne exceptionnelle.

Les Carter ne sont pas des millennials, mais ils les font rêver

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Les Carter ne sont pas des millennials, mais ils les font rêver. Ils sont le trait d’union avec cette catégorie qui ne dispose peut-être pas d’un pouvoir d’achat suffisant pour s’offrir un diamant, mais qui est déjà sensible aux codes du luxe insufflés dans la musique, le sport, l’automobile, la mode et les accessoires.  Tout semble agencé ici à l’aune de la puissance et de l’influence des parties prenantes. En 2021, on n’en est plus au storytelling sur Michael Jordan, ses victoires et ses paires de basket. On parie sur l’ultra business de l’ultra luxe sans préjugés ni complexes. Jay-Z gagne plus avec ses placements dans le champagne, l’immobilier, etc., qu’avec ses vinyles.

Avec ce joyau de Tiffany & Co dans sa besace – sa 75e acquisition -, LVMH ne peut pas rester à l’écart de ces phénomènes bornés par des tendances de fond : le rap noir américain est plus puissant que jamais et désireux de « vivre luxueusement ». Et cette inclusivité va au-delà du choix d’influenceurs noirs : le groupe de luxe vient d’embaucher en France une directrice de la diversité. La contestation portée par Black Lives Matter a créé un précédent dans les esprits et dans les politiques de communication. Le chausseur Louboutin a ainsi pris le risque d’offrir, pour sa campagne de communication, une paire d’escarpins à Assa Traoré, qui a posé en dénonçant « les violences policières ». Une façon glamour, disent certains, de montrer qu’elles ont capté l’époque, marquée par les questions d’inclusion et de diversité.

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