Opération séduction

Confrontées à l’intransigeance des bailleurs de fonds, les autorités cherchent à attirer de nouveaux investisseurs. Français en premier lieu.

Publié le 5 décembre 2003 Lecture : 3 minutes.

Huit ministres et un président pour séduire deux cent cinquante investisseurs français : les 8 et 9 décembre, la Chambre de commerce et d’industrie de Paris organisait les premières Journées économiques franco-gabonaises destinées à attirer à Libreville de nouveaux capitaux. Il s’agissait de nouer des partenariats entre les investisseurs des deux pays en vue de « créer de nouvelles PME-PMI dans des secteurs allant de l’agroalimentaire au tourisme ». Avec, en invité de marque, Omar Bongo Ondimba, venu réaffirmer dans la capitale française la nécessité de diversifier l’économie de son pays et d’y préparer l’après-pétrole.
Classé parmi les pays les plus riches d’Afrique avec un Produit intérieur brut (PIB) par habitant estimé à 3 719 dollars, le Gabon croule sous les dettes. Le paiement des seuls intérêts de la dette extérieure absorbe 67 % de ses recettes fiscales. La facture est d’autant plus difficile à honorer que le Gabon est confronté à la baisse de sa production de brut. Résultat : depuis 1999, morosité économique et taux de croissance négatifs se sont ajoutés aux difficultés de trésorerie.
Libreville peine à retrouver la confiance des bailleurs de fonds. Boudé par le Fonds monétaire international (FMI), depuis le mois d’avril 2002, pour n’avoir pas respecté les critères d’un programme signé en octobre 2000, il tente de faire amende honorable. Le 13 juin dernier, il a signé une lettre d’intention censée faciliter la conclusion d’un programme d’ajustement structurel triennal, appuyé par une facilité de crédit élargi. Les autorités espèrent être autorisées à renégocier leur dette avec les créanciers du Club de Paris. Évaluée à 2,5 milliards de dollars, celle-ci est majoritairement détenue par la France, qui soutient le dossier gabonais. Mais il en faudra plus pour convaincre le FMI, les représentants américains, britanniques et danois estimant que le Gabon doit être soumis à une période probatoire supplémentaire de six mois.
Bongo Ondimba ne cache pas sa déception. D’autant qu’il a discrètement satisfait, cette année, à une exigence de Washington en signant un accord de non-extradition des ressortissants américains qui pourraient être inculpés par la Cour pénale internationale (CPI), pour crimes de guerre notamment. Soucieux de redorer l’image de son pays, il a par ailleurs multiplié les gages de bonne volonté. Il s’est ainsi lancé dans la lutte contre la criminalité : l’opération Nguene (du nom d’un serpent tropical venimeux) vise à rassurer les populations – étrangères notamment – de Libreville. Et à encourager les investisseurs potentiels.
Le chef de l’État a également tenté de renouer avec la rigueur budgétaire à laquelle le FMI tient tant. Début août, il s’est engagé à réduire le train de vie de l’État en diminuant de manière significative le nombre des conseillers et des chargés de mission dans les ministères. Ils étaient 400 au sein du cabinet présidentiel ; ils ne seront plus que 80. Le Premier ministre va quant à lui sacrifier 40 de ses 70 « aides de camp ». À quelques exceptions près, chaque ministère ne disposera plus que d’une dizaine de conseillers. Leurs indemnités de fonction, jusqu’à présent officiellement comprises entre 150 000 F CFA et 500 000 F CFA (230 à 760 euros), ont également été réduites.
Nouveau signe de bonne volonté, le 26 septembre : les partenaires sociaux et le gouvernement signent une trêve. Après plus de quinze jours de négociations, les deux parties ont fini par trouver un terrain d’entente ; les premiers s’engagent à mettre leurs revendications salariales en sourdine jusqu’en 2006, et les seconds, à baisser de 15 % le prix de 125 produits de base.
En attendant la signature de l’accord triennal avec le FMI prévue pour début 2004, le Gabon tente de mettre en avant les efforts de diversification de son économie. Des efforts concrétisés par l’arrivée de nouveaux opérateurs : les sud-africains De Beers et SouthernEra Ressources (diamants et or) et le brésilien CVRD (manganèse). D’où la tenue des Journées économiques franco-gabonaises. L’expérience sera d’ailleurs renouvelée à Libreville en avril 2004. Cette fois, ce sont les investisseurs portugais qu’il faudra convaincre.

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