Roland Dumas

Ancien ministre des Affaires étrangères

Publié le 8 novembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Il reçoit dans le bureau de son appartement de l’île Saint-Louis. Costume élégant sur
chemise blanche tenue strictement classique ce jour-là. À 82 ans, Roland Dumas, personnage romanesque qui a traversé, et marqué, un demi-siècle de vie politique française, a repris du service. La tempête de l’affaire Elf est derrière lui. En 1999, soupçonné de recel et de complicité d’abus de biens sociaux pour avoir favorisé l’embauche par la compagnie pétrolière de Christine Deviers-Joncour et bénéficié d’une partie de la commission de 65 millions de francs qui lui avait été versée par Elf, Roland
Dumas avait choisi de démissionner de la présidence du Conseil constitutionnel pour assurer sa défense. En janvier 2003, il a été acquitté par la cour d’appel de Paris et le cauchemar a pris fin.
Blanchi, Dumas est retourné à sa vocation première: avocat. Au cours de sa carrière, il avait défendu les plus grands artistes du siècle. Aujourd’hui, il continue de traiter des affaires de droits littéraires et artistiques, intervenant, entre autres, pour le compte de certains membres des familles Picasso, Chagall et du compositeur Jules Masné. Sans oublier des affaires de droit commun et des dossiers en cour d’assises.

La rumeur lui prête aussi l’intention de conseiller plusieurs entreprises françaises ayant des dettes impayées avec la Libye. Mais « rien n’est décidé », précise-t-il, avant d’ajouter, cependant, que cela pourrait l’intéresser L’ancien ministre des Affaires européennes (1981-1983) et des Affaires étrangères (1984-1986 puis 1988-1993) de François Mitterrand est en effet très lié avec Mouammar Kadhafi avec qui il conserve une relation
« simple et personnelle » depuis son intervention dans le différend qui a opposé la Libye et le Tchad au début des années 1980. Lui-même vient de créer une association Forum Méditerranée dont l’objectif est de renforcer les liens culturels entre les différents pays du pourtour méditerranéen. La première assemblée générale doit se tenir à Tripoli,
en décembre, autour d’un panel d’acteurs culturels et économiques des deux rives de la Mare Nostrum.

la suite après cette publicité

Le virus de la politique n’a cependant jamais lâché l’aventurier du barreau. « J’ai milité toute ma vie, et souvent à contre-courant », dit-il. Il a 20 ans lorsque, durant la Seconde Guerre mondiale, il s’engage dans la résistance. Lors de la guerre d’Algérie,
il défend des militants du FLN, ce qui lui vaut une suspension du barreau. En 1956, à 34 ans, il est élu député socialiste indépendant à l’Assemblée nationale. Il s’engage dans les rangs de l’UDSR (Union démocratique et socialiste de la résistance) et du RDA
(Rassemblement démocratique africain, parti panafricain né en 1946). Ces premiers contacts avec le continent lui permettent de nouer des relations fortes et durables avec plusieurs dirigeants africains, et de devenir conseiller de certains d’entre eux, comme Omar Bongo Odimba. Aujourd’hui, l’homme de réseaux qu’il a été se réjouit de constater que « le Gabon a établi le multipartisme. La presse est libre, l’opposition existe. C’est une forme de démocratie à l’africaine. » Outre le chef de l’État gabonais, Abdoulaye Wade et Denis Sassou Nguesso comptent parmi ses amitiés africaines.
En 2004, près d’un demi-siècle après ses premiers pas de député, l’ancien mitterrandiste s’apprête à reprendre sa carte du Parti socialiste. « J’ai purgé ma peine », plaisante-t-il, faisant référence cette fois à la mesure d’expulsion de deux ans du parti dont il a été victime après avoir pris position contre le socialiste Arnaud Montebourg au profit d’un adversaire UMP lors des législatives de 2002. Les dissensions que connaît actuellement le PS le désolent. Il milite pour le « oui » au référendum sur la Constitution européenne et estime que « le cartelito des non est contre-nature. Comment
peuvent marcher d’un même pas Laurent Fabius et Philippe de Villiers ? Je comprends les questions de ceux qui prônent le non, mais ce n’est ni le lieu ni le moment de les poser. » L’Europe reste son sujet de prédilection et il est régulièrement sollicité pour intervenir à l’étranger lors de conférences sur des sujets européens.

Enfin, entre toutes ses autres activités, Roland Dumas s’adonne à l’écriture. Il achève un ouvrage historique sur l’action diplomatique de la France durant les deux septennats de François Mitterrand. À découvrir chez Fayard en 2005.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires