L’économie vaut bien une femme
Publié le 10 novembre 2004 Lecture : 2 minutes.
Quel souvenir garderont les Émiratis de Cheikh Zayed Ibn Sultan al-Nahyane, père et leader historique de la fédération des Émirats arabes unis, décédé le 2 novembre (voir « Adieu » p. 125) ? Sans conteste celui d’un dirigeant qui a fait le pari de la modernité et de la haute technologie pour transformer son pays et l’ancrer dans l’économie ondiale. Un visage incarne actuellement cette double évolution Celui de la souriante Cheikha Lubna al-Qasimi, la toute nouvelle ministre de l’Économie et du Plan depuis le remaniement ministériel du 1er novembre. C’est d’ailleurs presque dans un dernier souffle que Cheikh Zayed signait, un jour avant sa mort, le décret de nomination de la première femme à détenir un portefeuille ministériel aux Émirats depuis la création de la fédération en 1971.
Celle qui fait figure de grand argentier du pays n’a rien (en apparence) d’une femme moderne au sens occidental de l’acception. Elle arbore l’abaya, la shayla et le foulard, tenue traditionnelle de la plupart des femmes aux Émirats. Mais derrière l’habit se cache une personnalité particulièrement dynamique, inspirée et respectée pour son parcours. D’ailleurs, sa nomination, pour symbolique qu’elle soit, ne doit rien au hasard. Cheikha Lubna a fait ses preuves dans le monde des affaires qui plus est en pays arabe où les hommes ont tendance à régner sur les activités économiques. Nièce de Cheikh Sultan Ibn Mohamed al-Qasimi, elle n’a pas utilisé l’influence de son oncle pour prétendre à un poste dans la fonction publique une fois ses études d’informatique achevées à l’Université de Chico, en Californie. Elle décide plutôt de rejoindre une compagnie privée, Datamation, comme programmeuse. Elle est alors la seule employée émiratie. Six ans plus tard, elle est repérée par les responsables de l’Autorité portuaire de Dubaï. Sa détermination et ses qualités sont vite reconnues puisqu’on lui confie la responsabilité du système d’information du port. En 2000, le prince de Dubaï et le directeur du port et des douanes de la ville la choisissent pour diriger Tejari.com, le grand marché électronique de la place commerciale. Un an plus tard, les autorités lui demandent de piloter le développement d’Internet à Dubaï.
Dorénavant, Cheikha Lubna aura la lourde responsabilité du développement économique des Émirats. Une responsabilité qui ne lui fait pas oublier son engagement (en douceur) pour l’émancipation de ses surs. « Laissez les hommes vous admirer pour ce que vous représentez et ce que vous accomplissez, et les choses seront bien différentes », déclarait récemment la ministre émiratie.
