Staffan de Mistura n’a qu’une issue : l’autonomie du Sahara
Officiellement nommé ce 6 octobre, le nouvel envoyé spécial des Nations unies au Sahara ne réussira dans sa mission que si le Conseil de sécurité se prononce en faveur de la solution proposée par le Maroc.
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Rachid Lazrak
Professeur émérite de droit international à Casablanca
Publié le 9 octobre 2021 Lecture : 4 minutes.
Le poste était vacant depuis la démission, en mai 2019, de Horst Kohler, pour raisons personnelles. Le Conseil de sécurité des Nations unies vient enfin de nommer celui qui le remplacera comme envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental : le diplomate italo-suédois Staffan de Mistura. Sera-t-il chargé de la même mission que ses prédécesseurs ? Devra-t-il, lui aussi, rapprocher les positions des parties en vue de trouver « une solution politique réaliste, pragmatique, durable qui repose sur le compromis » ? La formule revient dans les résolutions du Conseil de sécurité depuis 2007 (n° 1754) et jusqu’en 2020 (n° 2548).
Complice d’une prise en otage
Si les missions du nouvel envoyé spécial ne devaient pas évoluer, l’ONU enverrait au monde un bien mauvais message, en donnant l’impression de vouloir laisser perdurer un conflit qui date de 1974. Et, surtout, de ne pas tenir compte des derniers développements autour de cette épineuse question : la reconnaissance par les États Unis de la marocanité du Sahara dans le cadre d’un statu d’autonomie, la dénonciation par le Polisario de l’accord de cessez-le-feu de 1991, la détérioration des relations entre le Maroc et l’Algérie ayant abouti à la rupture de leurs relations diplomatiques et les graves événements qui ébranlent la région du Sahel, avec la multiplication des coups d’États militaires et des actions de groupes terroristes.
Le Conseil de sécurité s’enferme à la fois dans une impasse et dans des contradictions
En n’optant pas pour une solution claire, le Conseil de sécurité s’enferme à la fois dans une impasse et dans des contradictions. En effet, alors qu’il affirme, depuis 2007, « se [féliciter] des efforts sérieux et crédibles faits par le Maroc pour aller […] vers un règlement [du conflit]», il se garde bien d’admettre clairement que cela passe par un statut d’autonomie du Sahara dans le cadre de la souveraineté marocaine, une proposition présentée par Rabat au secrétaire général de l’ONU le 11 avril 2017.
Pourtant, dans sa dernière résolution de 2020, il considère que « le statut quo n’est pas acceptable » et note « qu’il est essentiel que les négociations progressent pour que la qualité de vie des habitants du Sahara occidental s’améliore dans tous les domaines ». Aussi, il est temps que le Conseil de sécurité prenne ses responsabilités et cesse d’être le complice de la prise en otage de milliers de Sahraouis dans un conflit où ils sont instrumentalisés pour des raisons qui les dépassent. Il doit préciser ce qu’il entend par « solution politique », sachant que, depuis quatorze ans, aucune résolution n’évoque de référendum d’autodétermination, son organisation ayant échoué faute de pouvoir identifier les personnes susceptibles de voter.
Réaliste et pragmatique
La seule solution politique réaliste et pragmatique ne peut être que l’autonomie, alors que deux membres permanents – les États-Unis et la France – y sont favorables et que 42 États y ont exprimé publiquement leur adhésion. Dès lors, la mission de l’envoyé spécial ne doit plus consister à trouver une solution mais à mettre en œuvre celle de l’autonomie, en rapprochant les points de vue des parties.
Il est primordial de se préoccuper du sort terrible des Sahraouis qui vivent dans les camps de Tindouf
Reste que cette mission peut prendre des mois et peut-être des années. C’est la raison pour laquelle il est primordial de se préoccuper réellement du sort des Sahraouis qui vivent dans les camps de Tindouf, en Algérie, dans des conditions inhumaines. Ils ont été décimés par la pandémie de Covid-19, alors que 70% de la population vivant dans la partie du Sahara occidental administrée par le Maroc a été vacciné. Il est temps que le Conseil de sécurité ordonne le recensement de ces populations et permette à celles qui le veulent de regagner le Maroc lors d’une opération menée par l’envoyé spécial du secrétaire général et le chef de la Minurso – dont l’appellation doit d’ailleurs changer puisque l’organisation du référendum n’est plus à l’ordre du jour. Il pourrait aussi offrir aux populations sahraouies vivant au Maroc de regagner Tindouf.
Le Conseil de sécurité pourrait ainsi sortir l’affaire du Sahara occidental de l’impasse, coupant l’herbe sous le pied de certains États qui cherchent, pour des raisons qui leur sont propres, à maintenir le statu quo. « L’indépendance du Sahara occidental n’est pas une solution réaliste [ni] un objectif atteignable, affirmait déjà en 2008 Peter Van Walsum, alors médiateur de l’ONU pour le conflit du Sahara. Le statut actuel est intolérable : il est trop aisément accepté par les partisans inconditionnels du Polisario, qui ne vivent pas eux-mêmes dans les camps et qui sont convaincus que ceux qui y vivent préfèrent y demeurer indéfiniment plutôt que d’opter pour une solution négociée qui soit en deçà de l’indépendance totale. » Une déclaration pleine de bon sens et toujours d’actualité.
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