Le fiasco Air Cemac

Dans les cartons depuis six ans, la compagnie régionale n’a quasiment aucune chance de décoller.

Publié le 9 octobre 2007 Lecture : 3 minutes.

Depuis sa création au sommet de Yaoundé en 2001, Air Cemac a la réputation d’être un projet mort-né et ce n’est pas le silence radio de ses responsables actuels qui devrait l’arranger. Contactés par Jeune Afrique pour faire le point sur la relance du projet, tant Brussels Airlines, partenaire technique de l’hypothétique compagnie, que les officiels de la Cemac ont refusé de répondre à nos questions.
Victime des maladies infantiles de la Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale, Air Cemac n’a, effectivement, jamais donné de signes de viabilité. Idée prometteuse selon les experts, elle est pourtant plombée dès le départ par le refus de certains pays membres de céder leurs droits de trafic aérien au profit du transporteur communautaire. Les difficultés de Cameroon Airlines (Camair) et d’Air Gabon n’ont pas vaincu la nostalgie des pavillons nationaux. Si la privatisation de la première traîne en longueur, la seconde a été liquidée et a vu ses droits de trafic cédés à une nouvelle compagnie, Gabon Airlines, qui a démarré ses activités en avril dernier.

Le projet Air Cemac a également été freiné par des divergences portant sur le choix du partenaire stratégique. La candidature de Royal Air Maroc, soutenue par le Gabon, a été récusée par le Cameroun. La compagnie chérifienne voulait l’exclusivité des droits de trafic à l’international des pays de la zone. Ce qui signait l’arrêt de mort de la Camair. La clause fut donc écartée par les Camerounais. Par ailleurs, les investisseurs privés de la sous-région ne se sont pas bousculés pour acquérir des parts dans le capital fixé à 21 milliards de F CFA.
Le dossier semblait donc définitivement enterré. Mais Jean-Marie Maguena, ancien directeur général d’Air Gabon de 2001 à 2002, nommé le 25 mars à la vice-présidence de la Commission de la Cemac, l’a exhumé le 25 août en réitérant une promesse – passée inaperçue – faite par les chefs d’État lors du sommet de la Cemac des 24 et 25 avril à N’Djamena : voir décoller les premiers avions d’Air Cemac en mars 2008. À en croire l’agenda qu’il a annoncé, le comité de pilotage du projet devra convoquer une assemblée générale constitutive, doter Air Cemac d’un siège social, d’un conseil d’administration, nommer un directeur général et recruter et former du personnel dans les six prochains mois. Toutes choses qui laissent les observateurs sceptiques quant à la capacité des instances de l’organisation sous-régionale à tenir cet engagement.

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Cette assurance provient sûrement des réajustements opérés lors du sommet de N’Djamena. Les dirigeants des pays de la Cemac ont modifié les grandes lignes du projet : la présentation du tour de table réservait 52 % des parts aux investisseurs privés africains. Cette proportion a été ramenée à 16 % face au peu d’enthousiasme observé. Intervenant à hauteur de 5 % chacun, soit au total 30 % d’apport, la part des pays membres ne change pas. En revanche, Brussels Airlines, retenu comme partenaire technique d’Air Cemac en lieu et place de la RAM, en est le grand bénéficiaire. Elle hérite de 46 % des parts contre 18 % initialement accordés au partenaire technique. La compagnie belge devient donc l’atout maître de la mise en place d’Air Cemac.
En attendant, entre Toumaï Air Tchad et Air Congo Express, la tentation de créer de nouvelles compagnies nationales est grande. Pourtant, selon Jean-Cyril Spinetta, PDG du leader mondial Air France-KLM, les petites compagnies nationales « n’ont plus de modèle économique ». En Europe, elles se sont regroupées pour faire face aux défis de la libéralisation des marchés. Il est grand temps que les compagnies africaines suivent cet exemple.

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