Eric Noehrenberg

Directeur pour les questions de commerce international à la Fédération internationale de l’industrie du médicament

Publié le 8 septembre 2003 Lecture : 3 minutes.

Jeune Afrique L’intelligent : les termes de l’accord sur les génériques ont été élaborés il y a deux ans. Pourquoi la concrétisation arrive-t-elle seulement maintenant ?
Eric Noehrenberg : À Doha, en novembre 2001, l’attention était portée sur les pays en développement (PED). Au cours des négociations qui ont suivi, il a été question d’inclure tous les pays, toutes les maladies, tous les médicaments. Cela a retardé les choses. Les discussions au Conseil général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont permis de trancher et de finalement choisir de se concentrer sur les besoins des plus pauvres.

J.A.I. : Pourquoi les États-Unis ont-ils refusé de signer l’accord trouvé en décembre et accepté celui-là ?
E.N. : Je pense que si les États-Unis ont refusé de signer l’accord en décembre dernier, c’est qu’ils s’inquiétaient de son extension à tous les pays et à tous les médicaments. D’abord, cela aurait été préjudiciable pour la recherche. Ensuite, les producteurs de génériques ayant des capacités limitées, ils n’auraient certainement pas favorisé la production d’antipaludéens pour les pays pauvres. Mais plutôt celle, par exemple, d’antidépresseurs pour les pays riches. Ce point a été résolu.

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J.A.I. : L’accord en appelle à la « bonne foi » des États. Comment jauge-t-on la bonne foi ?
E.N. : Si nécessaire, l’importation de génériques sera autorisée. Mais il s’agit de développer une politique de santé, et non une politique commerciale en matière de santé. Là se loge l’idée de la bonne foi. Comment y veillera-t-on ? En théorie, les gouvernements devront expliquer pourquoi ils estiment ne pas avoir les capacités de production adéquates dans le secteur pharmaceutique. Les autres nations pourront également, lors des réunions du conseil, s’informer de l’usage fait de l’accord.

J.A.I. : Que répondez-vous aux ONG qui jugent cet accord inapplicable, car comportant des formalités administratives compliquées et décourageantes, qui vont en fait ralentir l’accès aux médicaments ?
E.N. : Je leur réponds que leurs craintes sont infondées. D’ailleurs, les pays africains se réjouissent de cet accord, qui correspond à leurs besoins. Au nombre de ces besoins, il y a l’assurance que ces médicaments ne seront pas détournés de leurs marchés, ce qui est courant dans les PED. Il faut donc que des statuts les protègent. Leurs capacités étant limitées dans ce domaine, les autres nations ouvriront l’oeil. En outre, les pays importateurs et exportateurs ne doivent faire que de courtes notifications à l’OMC, contenant quelques données simples afin que les autres pays sachent ce qui est offert, sous quelles conditions, mais aussi quel sera l’aspect de ces produits. Ce n’est pas si bureaucratique que cela, il s’agit juste de s’assurer que les gens auront les médicaments requis.

J.A.I. : Cet accord est-il bon pour l’industrie ?
E.N. : Les grands gagnants sont les PED, qui disposent désormais d’une solution répondant à leurs besoins. C’est une réelle victoire. Pour l’industrie, c’est une solution acceptable. Puisque cela concerne des mesures exceptionnelles, pour des pays déterminés, sans abus, avec une utilisation appropriée.

J.A.I. : Pensez-vous que les PED vont rapidement utiliser cet accord et acheter des médicaments ?
E.N. : Il y a tellement d’autres problèmes : de fonds, d’infrastructures, de personnels, de volonté politique… Maintenant que ce point est réglé, l’attention doit être portée sur ces éléments clés, facteurs déterminants de l’accès.

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