De multiples précédents

Publié le 8 septembre 2003 Lecture : 2 minutes.

Ce qui se prépare à Djibouti n’est que la répétition d’un scénario déjà bien rodé en Afrique. Les expulsions d’Africains à l’intérieur du continent sont en effet un phénomène récurrent et ancien, voire antérieur aux indépendances. En octobre 1959, Félix Houphouët-Boigny, alors Premier ministre de la Côte d’Ivoire dans le cadre de la Communauté française, expulse 10 000 Béninois et 7 000 Togolais employés dans les secteurs public et privé.
En 1965, le Sénégal procède à l’expulsion massive de Guinéens fuyant la répression de Sékou Touré. L’année suivante, la Sierra Leone, la Guinée et la Côte d’Ivoire font subir le même sort à des pêcheurs ghanéens.
Au début des années 1970, le mécontentement social naissant et la fin du « miracle économique zaïrois » conduisent à l’expulsion violente de centaines de Ouest-Africains (Sénégalais, Nigériens…) établis à Kinshasa et dans les deux Kasaïs. De même que la baisse des cours du coton et les premiers remous contre la dictature d’Idi Amin Dada poussent le pouvoir ougandais à chasser, en 1972, les 100 000 Indiens installés dans le pays depuis l’époque coloniale.
Mais l’opération la plus spectaculaire de cette décennie intervient au Gabon, au lendemain du sommet de l’OUA à Khartoum en juillet 1978. En riposte aux propos tenus à son encontre par Mathieu Kérékou lors de la grand-messe africaine, le Gabonais Omar Bongo expulse 9 000 Béninois.
Différend politique, brouille diplomatique, problèmes d’accès aux ressources ou pression sur l’emploi, difficultés économiques ou sociales, poussées nationalistes… les motifs d’expulsion sont multiples.
Invoquant la montée de la criminalité et la concurrence économique, le Nigeria bat tous les records en 1983 en chassant quelque 2 millions d’Africains, dont 1 million de Ghanéens et des centaines de milliers de Tchadiens, de Nigériens, de Camerounais… Avant de récidiver, en 1985, en expulsant 90 000 Ghanéens, ainsi que des Béninois, des Tchadiens et des Nigériens.
Cette même année, le colonel Kadhafi intime l’ordre à 30 000 Tunisiens et à 10 000 Égyptiens de quitter son pays, officiellement du fait de l’existence chez « un nombre non négligeable » d’entre eux « de cas de peste ». Bis repetita en 1995, lorsque le Guide décide de renvoyer chez eux 800 000 Égyptiens, 300 000 Soudanais, 300 000 Subsahariens et… 30 000 Palestiniens. Tout comme son homologue Omar Bongo, qui, en février de la même année, organise un nouvel « exode » de Sénégalais, de Nigériens, de Maliens, de Béninois…
Les traités sur la libre circulation des personnes n’empêchent pas les expulsions de continuer de plus belle : 50 000 Érythréens quittent l’Éthiopie en 1998, 15 000 Burkinabè la région ivoirienne de Tabou, en octobre 1999.
Au moment où ces lignes sont écrites, Kadhafi renvoyait chez eux 100 Tchadiens et 300 Soudanais. Leur tort : être des prisonniers de droit commun.

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