Burkina : un cas d’école

Dans ce pays où la forêt recule à grands pas, les initiatives locales de protection sont freinées par le manque de moyens. La Conférence des Nations unies qui s’est achevée le 5 septembre à La Havane laisse espérer des financements accrus.

Publié le 8 septembre 2003 Lecture : 3 minutes.

En 2000, la forêt couvrait près de 30 % de la superficie du Burkina. Selon la Banque mondiale, environ 1 % disparaîtrait chaque année. Un problème, commun à de nombreux pays du Sud sur lequel la Conférence des parties à la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification a planché, pour sa VIe édition, du 25 août au 5 septembre, à La Havane (Cuba).
Parmi tous les pays touchés, le Burkina pourrait faire office de cas d’école. Les raisons de l’hécatombe forestière, et donc de la dégradation des sols, y sont multiples, tout comme les solutions envisagées. La première cause est que, dans ce pays privé de ressources pétrolières et gazières, 90 % de la population utilise le bois comme unique source d’énergie, ce qui représente 5,2 millions de m3 de bûches par an. En outre, ne disposant pas d’engrais en suffisance, les agriculteurs doivent, afin de maintenir une certaine productivité, défricher pour créer de nouveaux champs. En 2002, 75 000 hectares ont ainsi été déboisés pour remplacer autant de surface agricole laissée en jachère. Quant aux cultures sur brûlis, elles touchent près de 60 % des sols. Comme l’explique Djiril Dakar, ministre de l’Environnement et du Cadre de vie, « les croyances veulent que, pour que la saison des pluies soit bonne, pour que les récoltes soient bonnes, pour que les hommes ne meurent pas, tels endroits doivent brûler à tels moments. Et même si les habitants commencent à ressentir les risques de cette pratique, cela n’a pas encore influé sur leurs actions. »
Même les menaces ne se montrent pas dissuasives. Le ministère a instauré en 1997 une amende allant de 50 000 à 500 000 F CFA (76 à 760 euros) pour punir toute personne allumant un feu, payable par le village si le coupable n’est pas identifié. Mais il n’est pas rare de voir un chef coutumier ou une délégation villageoise venir déposer cet argent pour obtenir l’autorisation tacite de déclencher un feu de brousse.
Enfin, les Burkinabè abattent les arbres pour mieux laisser divaguer leurs troupeaux. Déboisée, la terre se retrouve à nu et, dès les premières pluies, la couche fertile située en surface est lessivée, laissant affleurer la roche. La terre est charriée jusque dans les fleuves et dans les mares, accélérant le processus de désertification.
Pour Djiril Dakar, la préservation du couvert végétal passe par une gestion rationnelle des forêts. Celles-ci sont de deux types : les forêts protégées par décret, qui appartiennent à l’État, et les autres, dont la gestion est assurée par les villageois. Des programmes de sensibilisation et de valorisation ont été mis en place pour inciter les ruraux à prendre soin du couvert forestier. La plus récente de ces initiatives gouvernementales date du 28 juin dernier. Intitulée « Un département, une forêt », elle vise à doter chacun des 350 départements d’une étendue boisée couvrant entre 8 500 et 17 500 hectares. Les habitants seront chargés de veiller à sa bonne santé et à son accroissement régulier.
Mais ces démarches, si ambitieuses soient-elles, ne sont pas de taille à résoudre un problème d’une telle ampleur. Du côté de la Conférence des parties à la Convention sur la désertification, on a très longtemps eu de bonnes idées, sans pour autant avoir les moyens de les mettre en oeuvre. Ainsi, en 1999, a-t-il été convenu de demander aux État membres d’élaborer des plans nationaux de lutte contre la désertification. Chose faite immédiatement au Burkina. Mais, sans financement, ces bonnes intentions restent lettre morte. D’autant que le budget du ministère de tutelle représente moins de 1 % du budget de la nation. Alors, en 1999, le Fonds mondial pour l’environnement (FEM) est créé. Mais il n’avait pas vocation à être l’outil financier de la Commission de lutte contre la désertification. Une aberration réparée depuis le 29 août. Les chefs d’État, sous le soleil de La Havane, se sont enfin accordés sur l’utilité du FEM, dont l’emploi comme organe de financement devrait débuter en 2005. D’ici là, il aura fallu remplir ses caisses, pour l’heure vides.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires