La démocratie est un butin

Publié le 5 août 2005 Lecture : 2 minutes.

Encore une fois le Bénin n’aura pas failli à sa réputation. Des faubourgs de Cotonou jusqu’aux contreforts des montagnes de l’Atakora, les exigences et les vertus de la démocratie sont revendiquées par la population avec fierté, mais aussi détermination. Parfaitement conscient de cette réalité et toujours très habile pour jauger les rapports de force, le président Mathieu Kérékou, tel un vieux sage, a préféré se retirer. Après deux mandats successifs au bilan mitigé, l’homme à la canne ne se représentera pas lors de la prochaine élection présidentielle de mars 2006. La Constitution l’a emporté. Les vertiges du pouvoir ont cédé. L’heure de la retraite a sonné.
L’Histoire retiendra le parcours unique d’un militaire de carrière, révolutionnaire et chantre du « socialisme scientifique » durant les années 1970, agrippé au pouvoir jusqu’à la conférence nationale de 1990, battu avec les honneurs un an plus tard par Nicéphore Soglo, mais qui finalement retrouvera « son poste » en 1996, profitant des délices de l’alternance. Mathieu Kérékou aura été un homme de son temps, et son itinéraire est à l’image d’un pays qui a su cheminer avec talent pour en finir avec une époque révolue. Le parti unique, les discours interminables retransmis par la seule radio nationale, les opposants pourchassés, le pouvoir exercé à la force de la baïonnette ne sont plus qu’un lointain souvenir. Aujourd’hui, la démocratie au Bénin est un butin et personne n’a eu à ce jour l’impudence de fracturer le coffre. Les médias privés et indépendants, la Cour constitutionnelle aux avis redoutés sont autant de gardiens écoutés et respectés.
Quoi qu’il en soit, le départ annoncé de Mathieu Kérékou et la non-candidature probable de Nicéphore Soglo, ayant lui-même atteint la limite d’âge, place la classe politique béninoise devant ses responsabilités. Sera-t-elle à la hauteur ?
Les incertitudes électorales, la centaine de partis recensés, le vagabondage de certains élus au gré de leurs intérêts ponctué par des retournements d’alliances négociés en sous-main, le clientélisme érigé en méthode de gestion, sont autant de menaces qui planent sur l’avenir du Bénin. Les enjeux sont pourtant de taille alors que la population subit de plein fouet le ralentissement économique enregistré ces dernières années. L’ancien Dahomey traverse une passe difficile. Faute d’organisation, la filière cotonnière patine, et la chute des cours internationaux n’explique pas, à elle seule, les difficultés. La fameuse crevette de lagune qui remplissait les caisses de l’État en devises ne trouve plus grâce aux yeux des acheteurs européens. Parallèlement, le port de Cotonou s’enlise dans les méandres des tracasseries en tout genre et les investisseurs étrangers constatent, depuis un ou deux ans, une nette détérioration de l’environnement des affaires. En clair, la corruption gagne du terrain. Après celui de la démocratie, les Béninois doivent à présent relever le défi du développement économique.

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