Chez Nous, une marque loin d’être victime de la mode

Camélia Barbachi a étudié le commerce avant de s’orienter vers la mode. À 24 ans, elle a créé une première collection mêlant ses racines nordistes et djerbiennes, avec la volonté de proposer un modèle alternatif.

Pour la créatrice de Chez Nous, « la dimension multiculturelle est fondamentale ». © Chez Nous

Pour la créatrice de Chez Nous, « la dimension multiculturelle est fondamentale ». © Chez Nous

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Publié le 27 octobre 2021 Lecture : 3 minutes.

Sa plaquette promotionnelle et le site internet qui propose de précommander ses premiers articles sur le modèle du crowdfunding sont sérieux, sobres, et respirent le professionnalisme. À 24 ans, Camélia Barbachi n’a visiblement pas de temps à perdre et sait précisément où elle veut aller. Née à Roubaix, dans le nord de la France, de parents tunisiens, elle a étudié le commerce international à Lille avant de décrocher un MBA aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Puis d’enchaîner sur une formation spécifique aux métiers de la mode.

« Chez nous là-bas »

En 2019, elle rédige une thèse de fin d’études consacrée aux effets négatifs de la fast fashion, cette mode « jetable » que l’on retrouve dans nombre d’enseignes textiles, où les articles sont souvent vendus à prix modiques mais affichent un bilan écologique et social peu reluisant. « Je voudrais proposer une alternative à ce modèle, une mode plus responsable », souligne la jeune femme à propos de sa première collection, qui porte la marque Chez Nous. Une expression que les Tunisiens utilisent pour désigner les bi-nationaux nés ou vivant en Occident, les « chez nous là-bas ».

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La collection actuelle comprend des tee-shirts, un cabas, un bob, des chaussettes et surtout une sur-chemise qui constitue le modèle phare. « Je me suis inspirée de la blouza, qui est un vêtement traditionnel djerbien. J’ai toujours vu mon grand père la porter. Je l’ai transformée pour en faire un vêtement non genré, produit à partir de fibres artificielles dont la fabrication nécessite très peu d’eau et d’énergie. »

En tant que femme issue de l’immigration nord-africaine, je n’ai jamais vraiment pu m’identifier aux images que projette l’industrie de la mode

Le ton est donné, et on le comprend vite en allant parcourir la page consacrée au crowdfunding du projet, sur la plateforme participative Ulule. Camélia Barbachi veut développer une mode éthique, s’appuyant sur ses deux cultures. La confection est donc confiée à la fois à un atelier d’insertion professionnelle spécialisé dans le tricot du nord de la France, et à un site de production situé à Ksar Hellal, en Tunisie, qui respecte des normes de certification très strictes. « Tout ça est important dans le projet, insiste la jeune femme. Travailler avec des personnes exclues, avoir un impact à la fois en France et en Tunisie… »

Tailles XXXL

Sur les photos présentant les produits, les mannequins qui posent, un jeune homme et une jeune femme, sont noir et métis. Pas un hasard, là encore. « Ce sont des gens que je connais, explique la créatrice. La dimension multiculturelle est fondamentale dans le projet : en tant que femme issue de l’immigration nord-africaine, je n’ai jamais vraiment pu m’identifier aux images que projette l’industrie de la mode. Il y a bien quelques mannequins noirs, mais cela reste rare. Quand vous êtes une femme arabe ou que votre morphologie ne correspond pas aux normes, c’est impossible de vous y retrouver. » Chez Nous propose d’ailleurs des tailles allant jusqu’au XXXL.

Soucieuse de ne pas brûler les étapes, Camélia Barbachi mise d’abord sur le financement participatif pour se faire connaître et viabiliser le projet. La campagne, lancée le 5 octobre, visait d’abord à assurer 100 précommandes. L’objectif a été rapidement atteint, le prochain palier se situe à 250 pièces, ce qui constitue pour l’entrepreneuse le seuil de la rentabilité. D’autres modèles verront bien sûr le jour. Et si une enseigne de distribution classique se manifeste ? La jeune femme étudiera les propositions. « Mais je n’irai pas dans n’importe quelle enseigne, précise-t-elle. Cela dépendra des valeurs qu’elle porte. » Éthique jusqu’au bout, Mlle Barbachi.

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