Y’en a plein la coupe !
Publié le 9 mars 2004 Lecture : 2 minutes.
« Les Africains sont de grands enfants, incapables de faire du mal à une mouche », croient savoir certains. « Ils ont du mal à se prendre en main », répètent à l’envi d’autres. « Ils ont le rythme dans la peau », proclament, bien souvent, les mêmes, avec tous les sous-entendus que cela suppose. « L’Afrique n’est pas mûre pour la démocratie », décrète un homme d’État français. « Elle est rétive au développement et au progrès », renchérissent les nouveaux maîtres-penseurs et autres licenciés ès négrologies, avant d’annoncer sa mort prochaine. On croyait ces petites vérités révélées réservées à la caste politique et à l’intellocratie. Mais voilà que le petit monde du sport, qui n’échappe pas toujours aux préjugés, il est vrai, à son tour s’y met !
Franz Beckenbauer, ancien libero de la Mannschaft, l’équipe nationale de foot d’Allemagne, a ouvertement critiqué, le 3 mars, le principe de l’alternance entre continents retenu par la Fifa pour l’organisation de la Coupe du monde, qui doit échoir pour la première fois à l’Afrique en 2010. Que dit, donc, le Kaiser, l’Empereur, comme on l’appelait à ses heures de gloire sur les stades ? Que « l’Europe ne peut attendre vingt-quatre ans pour accueillir une Coupe du monde. L’Union européenne de football a commis une grosse erreur en acceptant la règle de la rotation. » Comme chacun le sait, le Maroc, l’Afrique du Sud, l’Égypte et la Tunisie, conjointement avec la Libye, attendent de savoir, le 15 mai prochain, lequel d’entre eux sera retenu par la Fifa pour accueillir en 2010 cette grande manifestation sportive.
Décidément inspiré, et engoncé dans ses certitudes, Beckenbauer, qui préside aujourd’hui le Comité d’organisation du Mondial 2006 (prévu en Allemagne), de poursuivre : « La question est de savoir si un seul État africain peut organiser la Coupe du monde ! Il s’agit tout de même d’accueillir trente-deux pays, de recevoir plus d’un million d’étrangers. Quel pays africain pourra assurer cette mission ? À vrai dire, un seul pourrait le faire. Il s’agit, en l’occurrence, de l’Afrique du Sud. Ou, peut-être, le Maroc, qui présente son dossier pour la quatrième fois. » L’Afrique du Sud, le seul pays « européen » du continent, contrôlé, il y a à peine une décennie, par une minorité blanche. Il fallait y penser ! Les Marocains, eux, apprécieront le « peut-être ». Quant aux autres…
