Mali : le grand cafouillage entre l’État et les jihadistes
Ce jeudi 21 octobre, le gouvernement malien a démenti toute négociation avec les chefs jihadistes. Une information pourtant confirmée par le ministère des Affaires religieuses deux jours plus tôt. L’exécutif a-t-il eu peur de mécontenter la France ? Retour sur cet imbroglio.
C’est à n’y plus rien comprendre. Ce mardi 19 octobre, l’information tombe sur les ondes de Radio France internationale : le gouvernement malien a mandaté le Haut conseil islamique (HCI) afin de négocier avec les chefs jihadistes Iyad Ag Ghaly, le chef du JNIM, et Amadou Koufa de la katiba Macina.
Confirmée par le ministre malien des Affaires religieuses, Mamadou Koné, l’information marque un changement de posture des autorités maliennes. Alors que la demande est émise de longue date par les Maliens, les autorités assument désormais leur volonté de négocier officiellement avec les groupes armés terroristes.
Rétropédalage
Sauf que deux jours plus tard, la communication du gouvernement dit le contraire. Dans un communiqué lu à la télévision nationale, la Primature dément avoir chargé qui que ce soit de négocier avec Ag Ghali et Koufa. « Aucune organisation nationale ou internationale n’a été mandatée officiellement pour mener une telle activité », peut-on lire dans le document.
Le ministre des Affaires religieuses a-t-il anticipé l’annonce sans l’accord du chef du gouvernement ? Les autorités ont-elles rétropédalé ? La Primature, contactée par Jeune Afrique, se refuse à tout commentaire, se réfugiant derrière le communiqué publié et se détachant de toute position qu’ait pu prendre le ministère des Affaires religieuses et du Culte. Du côté de ce dernier, on ne souhaite pas non plus commenter.
L’équipe gouvernementale ne donnera donc pas plus de détails. Mais la Primature ne ferme pas pour autant la porte aux négociations. « Le gouvernement a bien noté les recommandations […], allant dans le sens de négociations entre tous les fils du pays afin de les réconcilier pour la stabilité du Mali. [Il] note que des bonnes volontés se sont manifestées pour mener des négociations. À cet effet, il salue leur initiative et les remercie des démarches entreprises pour ramener la stabilité et la quiétude dans les différentes régions du pays », fait valoir le communiqué.
Ligne rouge pour Paris
Alors pourquoi ce changement de cap ? Certains croient y voir le résultat d’une pression extérieure. Pour la France, partenaire privilégié du Mali dans la lutte contre le terrorisme, la négociation avec les jihadistes est une ligne rouge, incompatible avec la présence de soldats français au Mali. Pour autant, l’Élysée, qui s’est plusieurs fois exprimé sur le sujet, n’a pas officiellement réagi à l’information publiée en début de semaine.
Peut-être le rétropédalage des autorités maliennes pourrait alors simplement résulter d’un cafouillage au sein du gouvernement de Choguel Maïga, qui, sans cacher sa volonté de négocier avec les jihadistes – comme le confiait le Premier ministre malien à Jeune Afrique le 16 octobre dernier –, n’a pas encore l’intention d’officialiser la démarche.
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