Destination haute technologie

Le royaume attire désormais des investisseurs dans des secteurs de pointe, comme l’électronique ou l’informatique.

Publié le 8 mars 2004 Lecture : 3 minutes.

Neiges de l’Atlas surplombant Marrakech en fleurs, médina médiévale de Fès, plages ourlées de rouleaux atlantiques d’Agadir : le Maroc séduit chaque année 3 millions de touristes ; mais un nombre croissant d’investisseurs étrangers y débarquent aussi pour travailler. En 2003, le royaume a drainé 3 milliards d’euros d’Investissements directs étrangers (IDE, y compris les privatisations), contre une moyenne annuelle de 500 millions d’euros dans les années 1990. « Oublions les clichés », plaide Hassan Bernoussi, le patron de la Direction des investissements extérieurs à Rabat. « Ce saut quantitatif démontre que le Maroc attire vraiment les investisseurs internationaux. Et pas seulement dans les secteurs de la confection, du tourisme ou des centres d’appels. L’électronique, les équipements automobiles, l’industrie aéronautique et les services aux entreprises sont des secteurs en plein essor, grâce à l’afflux de capitaux et de savoir-faire de grands groupes internationaux. »
Au cours des dernières années, toutefois, ce sont surtout les grandes opérations de privatisation qui ont joué un rôle moteur. Après une pause en 2002, le programme des cessions des parts des entreprises a été relancé en 2003 : le groupe franco-espagnol Altadis a ainsi acquis 80 % du capital de la Régie des tabacs, pour un montant de 1,29 milliard d’euros. De même, le groupe français Renault a pu racheter 38 % du capital de la Société marocaine de construction automobile (Somaca) détenus par l’État marocain, portant ainsi sa participation à 46 %.
Deux grandes opérations sont programmées pour 2004. Le groupe français Vivendi, qui a déjà acquis 35 % de Maroc Télécom pour un montant de 2 milliards d’euros, devrait emporter de nouveaux actifs parmi les 16 % actuellement détenus par l’État, devenant ainsi l’actionnaire majoritaire. Par ailleurs, la Banque centrale populaire, première banque de dépôt du royaume, verra la totalité de son capital mise sur le marché, suscitant déjà les convoitises des principales banques françaises et espagnoles.
« L’investissement étranger existe aussi hors privatisations, avec des projets créateurs de richesse », insiste Hassan Bernoussi. Le groupe franco-italien STMicroelectronics a ainsi investi 400 millions d’euros depuis trois ans, dans une unité high-tech de composants électroniques à Bouskoura 2000 – un site industriel dédié aux télécommunications -, dans la banlieue de Casablanca, créant ainsi deux mille emplois.
De même, Assystem, filiale de la Société nationale d’étude et de construction de moteurs d’aviation (Snecma) en France, contribue au Maroc à la fabrication des moteurs d’Airbus A-380 ; tandis qu’une autre entreprise de l’Hexagone spécialisée dans les services informatiques, SQLI, s’est implantée dans la banlieue de Rabat. Particularité de ces deux sociétés : leurs patrons sont des Marocains, qui ont mené leur carrière en France. Ils savent que leur pays est un vivier d’ingénieurs et d’informaticiens bien formés, dont les salaires sur place ne coûtent qu’un tiers de ceux de leurs homologues en Europe !
Au demeurant, l’investissement étranger reste surtout le fait de grands groupes, majoritairement français (au cours des quinze dernières années, les investissements français ont représenté la moitié du flux global). Les PME sont en revanche souvent à la peine, leurs responsables se plaignant surtout des lourdeurs bureaucratiques, et parfois de certaines pratiques comme les « commissions occultes » ou la concurrence déloyale non sanctionnée, notamment pour les entreprises faisant de la contrefaçon.
Conscientes de ces problèmes, les autorités marocaines ont pris des mesures pour faciliter la vie des entreprises : un nouveau code du travail adopté en 2003, des guichets uniques régionaux pour les investisseurs, des subventions ciblées. L’État participe ainsi à financer l’acquisition de terrains, d’infrastructures, de bâtiments pour les secteurs textile, automobile, aéronautique et touristique.
« S’il reste encore beaucoup à faire pour l’accueil des PME, l’arrivée des investisseurs étrangers favorise aussi, par effet d’entraînement, la prise d’initiative des entrepreneurs marocains », estime de son côté Nadia Fettah Alaoui, directrice générale de Maroc Invest, un fonds de capital-développement destiné aux entreprises marocaines.
C’est tout le pari de l’ouverture du Maroc aux capitaux étrangers. Ces derniers ne doivent pas seulement stimuler l’emploi et la croissance (5,5 % en 2003), ils doivent aussi préparer l’économie du pays au libre-échange intégral en mettant les entreprises locales en concurrence avec les opérateurs internationaux. En 2010, dans le cadre de l’Accord d’association avec l’Union européenne, toutes les barrières douanières devraient être levées entre les deux ensembles. Six ans ne seront pas de trop pour préparer cette échéance.

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