Tchad : Baba Laddé, l’art de la rébellion… et du rebond
Nommé le 14 octobre à la tête des renseignements généraux par Mahamat Idriss Déby Itno, l’ex-rebelle et préfet a fait un retour remarqué sur le devant de la scène tchadienne. Portrait du « père de la brousse », chef peul aux multiples vies.
Depuis quelques minutes, un garde du corps a ouvert un parapluie au-dessus de la silhouette d’Idriss Déby Itno. Le chef de l’État, canne à la main, continue d’égrener ses arguments de campagne devant une foule de partisans rassemblés par le Mouvement patriotique du salut (MPS). Sur la piste de l’aérodrome de Bongor, à la frontière avec le Cameroun, il achève en ce 1er avril 2021 la tournée qui l’a déjà mené dans la plupart des régions du pays en prévision du scrutin présidentiel qui aura lieu dix jours plus tard. Personne ne doute de sa réélection. La ferveur est attisée par les cadres du MPS autant que par le soleil brûlant dont Idriss Déby Itno a fini par devoir se protéger.
À quelques mètres de la scène, dans une tribune rassemblant des VIP, Baba Laddé patiente. Les personnes qui l’entourent ont le regard surpris. Quelques jours plus tôt, l’ancien gendarme devenu rebelle se trouvait encore au Sénégal, racontant à Jeune Afrique un exil forcé qui l’avait auparavant mené au Cameroun et au Nigeria. Ayant échoué à présenter sa propre candidature à la présidentielle, il affirmait alors être « déterminé à agir pour provoquer l’alternance et tourner la page du système Déby ». Que fait donc ce rebelle aux aspirations d’opposant au pied du podium où Idriss Déby Itno achève son long discours ?
De discrètes négociations sont passées par là. Et, en ce 1er avril, l’ex-gendarme en tenue blanche s’avance sur la scène de Bongor. « Je suis Baba Laddé et je soutiens le maréchal ! », lance-t-il au côté de l’homme qu’il avait juré de combattre. Un garde du corps lui reprend le micro et le meeting s’achève. Idriss Déby Itno savoure le coup de communication et s’affiche comme le candidat de la réconciliation. La foule se disperse et Baba Laddé poursuit sa discrète opération de réhabilitation. Le lendemain, le chef de l’État quitte Bongor sans avoir reçu l’ex-gendarme.
« Tu seras Baba Laddé »
Mahamat Abdoul Kadre Oumar, qui deviendra plus tard Baba Laddé, naît le 21 juillet 1970 à Gounou-Gaya, au sud de Bongor. Son père, un marchand dont la mère est peule et le père barma, est l’un des leaders de la communauté commerçante de la région. Mais c’est dans la famille, elle aussi peule, de sa mère, que le futur rebelle est élevé. Il est particulièrement proche de sa grand-mère, tandis que son père est absent. Marié plusieurs fois, ce dernier a d’autres enfants et se consacre à son commerce.
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