Vers une reprise du conflit entre l’Érythrée et l’Éthiopie ?

Publié le 7 novembre 2005 Lecture : 3 minutes.

Après cinq années de présence en Éthiopie et en Érythrée, les forces onusiennes de maintien de la paix, déployées pour mettre un terme au conflit frontalier qui oppose les deux pays, ont perdu presque toute marge de manoeuvre. À mesure que les crises se multiplient, les menaces d’une nouvelle guerre entre les frères ennemis deviennent plus prégnantes.

Le dernier incident en date est le fait de l’Érythrée, qui a interdit aux hélicoptères de l’ONU de survoler son territoire. Désormais incapable de surveiller l’évolution des troupes et dépourvue de moyens pour effectuer des patrouilles nocturnes ainsi que des opérations de déminage, l’ONU, qui a dû en conséquence évacuer 18 de ses 40 postes de contrôle, a déclaré qu’elle ne maîtrisait pas plus de 45 % de la zone frontalière.
La situation risque de s’aggraver, l’Inde et la Jordanie, qui fournissent le plus gros du contingent des forces onusiennes, ayant déclaré il y a deux semaines, à New York, que si le Conseil de sécurité ne prenait pas les choses en main le déploiement de leurs hommes serait remis en question. Comme pour apporter de l’eau à leur moulin, trois soldats kényans ont été blessés le 17 octobre dernier lors d’un accident de la route : ne pouvant être évacués par hélicoptère comme la règle l’exige, ils l’ont été par voie de terre.

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Pour Jean-Marie Guéhenno, le chef des opérations de maintien de la paix de l’ONU, l’impasse est révélatrice : le succès d’une telle mission dépend de la volonté politique des parties. D’ailleurs, à ses débuts, il y a cinq ans, l’opération n’était qu’une intervention classique, menée de concert avec deux États souverains et deux armées régulières. Mais peu à peu, les différends l’ont enlisée. Et, en avril 2002, l’arrêté de la commission internationale des frontières – la localité de Badme, la pomme de discorde entre les deux pays, a échu à l’Érythrée – a achevé de la couler.
Après avoir fait mine d’accepter le verdict, l’Éthiopie s’est ravisée, et la délimitation de la frontière s’en est trouvée suspendue pour une durée indéterminée. Face à Addis-Abeba qui dit vouloir le dialogue, Asmara refuse les négociations, arguant que la communauté internationale doit d’abord contraindre sa voisine à entériner la décision de la commission.

Pendant que les tensions s’attisent, les garants de l’accord – essentiellement les États-Unis, l’Union européenne et l’Union africaine – sont montrés du doigt. « Ces trois dernières années, très peu a été fait pour résoudre le problème de Badme. Si ça continue, la guerre sera inévitable et l’ONU forcée de se retirer, analyse Ted Dagne, spécialiste des questions africaines au Congrès américain. On est en train de créer un précédent extrêmement dangereux, ajoute-t-il : vous avez un traité de paix et une mission de l’ONU, et la situation continue de se détériorer.
Si la communauté internationale échoue à prévenir un nouveau conflit, on peut s’interroger sur la viabilité de l’accord fraîchement signé au Soudan, ainsi que sur l’avenir de la mission de l’ONU sur place », conclut-il.
John Bolton, ambassadeur des États-Unis à l’ONU, semble l’avoir entendu, qui affirmait récemment devant le Sénat que « le Conseil de sécurité doit jouer son rôle : […] résoudre les conflits politiques sous-jacents pour que les opérations de maintien de la paix ne soient que transitoires ».

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