Guebuza à Paris

Pour sa première visite officielle en France, le chef de l’État, élu en décembre 2004, n’est pas rentré les mains vides.

Publié le 7 août 2006 Lecture : 3 minutes.

La communauté internationale ne tarit pas d’éloges sur Armando Guebuza, président de la République du Mozambique élu en décembre 2004. Bon élève de son prédécesseur, Joaquim Chissano, dont il s’évertue à suivre la politique libérale, Guebuza s’est engagé – notamment par le biais du mécanisme d’évaluation par les pairs du Nepad – à veiller au respect de l’indépendance de la justice et des droits de l’homme, à garantir la liberté de la presse, à lutter contre la corruption. Son premier chantier a été la réduction de la dette, qu’il a obtenue après la réunion du G8 en Écosse en juillet 2005. En visite officielle à Paris, les 20 et 21 juillet, il a été reçu par son homologue Jacques Chirac, lequel n’a pas hésité à renchérir : « Le Mozambique est un modèle pour l’Afrique. »
Guebuza garde la tête froide. « Je préfère parler de défis, plutôt que de défauts, réplique le chef de l’État en jouant sur les mots avec un grand sourire. J’en ai trois à relever : le développement des zones rurales, où vivent la plupart de mes concitoyens et où se trouve l’essentiel des richesses du pays ; l’éducation de base, la formation des jeunes en fonction des besoins de l’économie et la création d’une élite de diplômés de haut niveau ; enfin, le développement des infrastructures, notamment des routes, pour dynamiser le commerce et la distribution. »
L’accord bilatéral de partenariat avec la France, signé dans l’après-midi du 21 juillet, répond à cette ambition puisque l’aide qui en découle va porter en priorité sur les infrastructures et les zones rurales, ainsi que sur la santé et l’environnement. « Le Mozambique possède un vaste écosystème et des paysages variés dont il peut tirer un grand bénéfice sur le plan touristique, à condition de savoir en assurer la protection », explique le chef de l’État. Le montant de l’enveloppe est de 60 à 80 millions d’euros, étalés entre 2006 et 2010.
On sent dans ses propos autant le politique que l’homme d’affaires. Guebuza est en effet rompu aux arcanes d’une vie politique mozambicaine plus que mouvementée. Né en janvier 1943 à Murrupula, dans le nord du pays, il s’engage dès l’âge de 20 ans dans la lutte de libération contre le colonisateur portugais au sein du Front de libération du Mozambique (Frelimo), parvient rapidement au comité central mais reste dans la guérilla sur le terrain jusqu’à l’indépendance, en 1975. Pendant la guerre civile, de 1977 à 1992, il est plusieurs fois ministre, notamment de l’Intérieur puis de la Défense, et conduit la délégation gouvernementale lors des accords de paix conclus à Rome en 1992.
Élu député en 1994, Guebuza dirige le groupe parlementaire du Frelimo, parti majoritaire, jusqu’en 2002 avant de se voir confier la charge de secrétaire général. Parallèlement, il crée plusieurs sociétés et devient actionnaire majoritaire dans nombre de grandes entreprises du pays (banque, brasserie, conteneurs, construction, tourisme et médias). Depuis qu’il occupe le fauteuil présidentiel, il gère son portefeuille d’actions avec prudence et prend garde à ne pas se faire prendre dans un conflit d’intérêts en contradiction avec ses fonctions officielles.
Les tempes grisonnantes, le sourire affable, Armando Guebuza prône le pragmatisme, l’efficacité et le développement à tout-va. Un exemple parmi d’autres : quoique lusophone, il a demandé pour son pays le statut d’observateur à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Son entretien, le 21 juillet à Paris, avec le secrétaire général de la Francophonie Abdou Diouf a porté sur une future collaboration entre l’OIF et la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) à laquelle appartient le Mozambique.
C’est une porte ouverte vers le développement de l’enseignement supérieur et des échanges culturels. Sa seule crainte ? Le découragement. Il redynamise la bonne volonté des investisseurs tant publics que privés. Il a d’ailleurs rencontré des membres du Mouvement des entreprises de France (Medef), dont une délégation se rendra avant la fin 2006 à Maputo. « Nous devons agir tous azimuts, car le pays souffre de graves problèmes, comme celui du million de mines encore disséminées dans les champs et les chemins. La communauté internationale ne doit pas céder à la lassitude devant l’immensité de la tâche. Nous lui donnons tous les gages possibles pour l’encourager à poursuivre ses aides. »

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