Urgence prisons
La tuerie dans le pénitencier de New-Bell à Douala pose une nouvelle fois la question du surpeuplement et du délabrement des maisons d’arrêt.
Le bilan particulièrement élevé – 17 morts – de la répression consécutive à la tentative d’évasion de détenus, le 29 juin dernier à Douala, est venu rappeler la situation dramatique que connaissent les prisons camerounaises. Cela fait plusieurs années que les incidents se suivent et se ressemblent. En janvier 2006, une mutinerie éclate dans la même maison d’arrêt de New-Bell et, lourdement réprimée, fait cinq morts. Un an plus tard, 71 gardiens de la prison centrale de Kondengui, à Yaoundé, manifestent pour revendiquer de meilleures conditions de travail. À la clé, de nombreuses arrestations.
En janvier dernier, une trentaine de détenus s’échappent du pénitencier de Bafoussam, chef-lieu de la province de l’Ouest, à 350 km de Douala, alors que, un an auparavant (nuit du 28 au 29 juin 2007), c’est dans celle de Yoko, à 465 km au nord de Yaoundé, que 28 des 120 détenus s’étaient fait la belle.
Amadou Ali, le vice-Premier ministre en charge de la Justice et de l’Administration pénitentiaire, admet que ces troubles « graves » peuvent être favorisés par « quelques complicités » ou, à tout le moins, « quelques négligences » internes. Sans toutefois aborder le sujet vers lequel tous les regards convergent : le délabrement et la surpopulation des prisons de l’ensemble du pays.
Une situation dénoncée en son temps par l’ex-régisseur de la prison centrale de Douala, limogé après les émeutes du début de l’année. Simon Pierre Ayissi avait alors évoqué les conditions de travail difficiles, le personnel insuffisant en qualité et en quantité, les moyens matériels sans commune mesure avec les exigences de sécurité qu’impose ce type de lieu. Cela alors même que les gardiens doivent faire face à des effectifs démesurés : à Bafoussam, près de 1 300 détenus pour à peine 300 places ; à Douala, 3 800 personnes pour une capacité d’accueil de 800 ; et, à Yaoundé, 3 700 prisonniers pour moins de 1 000 places. Conséquence, sur l’ensemble des 70 prisons du pays, à peine un repas est servi par jour à chaque détenu, l’insalubrité y est chronique, les besoins aussi élémentaires que l’eau potable et l’accès aux toilettes difficilement assurés. D’où les maladies, mais aussi les trafics de tous ordres et la violence sous toutes ses formes.
Pour améliorer la situation carcérale, le gouvernement peut compter sur un soutien financier aussi bien de la France que du Fonds européen de développement. Lequel, à travers le Programme d’amélioration des conditions de détention et du respect des droits de l’homme (Pacdet), apporte 8 millions d’euros – 5,2 milliards de F CFA – sur trois ans.
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