Locales au Sénégal : pourquoi les listes de l’opposition ont été rejetées

Pour l’opposition, le scrutin de janvier aura valeur de test, mais la coalition Yewwi Askan Wi a vu plusieurs de ses listes retoquées. De Dakar à Kédougou, elle accuse certains préfets de vouloir favoriser la majorité au pouvoir.

Vote dans un bureau du Plateau, à Dakar, en février 2019 © CARMEN ABD ALI/AFP

Vote dans un bureau du Plateau, à Dakar, en février 2019 © CARMEN ABD ALI/AFP

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Publié le 9 novembre 2021 Lecture : 4 minutes.

Le Pastef d’Ousmane Sonko et les cadres de Yewwi Askan Wi, la principale coalition de l’opposition, ont-ils raison de se sentir visés ? Sitôt déposées, plusieurs des listes qu’ils avaient formées dans la perspective des élections locales du 23 janvier prochain ont en effet été rejetées par les préfectures chargées d’en examiner la validité. Dans le vaste département de Guédiawaye, en banlieue dakaroise, les listes présentées dans les communes de Golf Sud et de Sam Notaire ont été jugées « irrecevables ». Yewwi Askan Wi a également essuyé des revers dans les villes de Kédougou, dans le sud-est du Sénégal, et de Mbour, à 80 km au sud de Dakar.

Listes « incomplètes »

Dans cette localité, chef-lieu du département du même nom, Abdoulaye Tall, désigné tête de liste, n’a pas pu déposer son dossier de candidature. « Yewwi Askan Wi s’est présentée dans les locaux de la préfecture [le mercredi 3 novembre] à 22 h 34. Et nous avions pris toutes les dispositions en y allant, avec un huissier qui a constaté l’heure à laquelle les mandataires sont entrés dans les locaux », a insisté Cheikh Tidiane Youm, cadre du Parti de l’unité et du rassemblement (PUR) lors d’une conférence de presse organisée par la coalition en présence de Ousmane Sonko et de Khalifa Sall, l’ancien maire de Dakar. « Mais au moment où ils devaient passer devant la commission, le préfet leur a demandé si le dossier était complet. Le mandataire lui a répondu que c’était le cas et qu’il attendait juste quelques éléments, a-t-il poursuivi. Le préfet a dit : “Dans ce cas, le dossier n’est pas complet”. Il l’a rejeté sans pour autant le consulter. »

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Yewwi Askan Wi ne sera pas non plus dans les starting-block pour briguer les sièges du conseil départemental de Saint-Louis, où sa liste de candidatures a été jugée « incomplète » par la commission qui réceptionnait les dossiers. À l’en croire, elle ne contiendrait que 22 titulaires sur les 27 requis pour les postes de conseillers départementaux. La liste de Gueum Sa Bopp, une autre coalition de l’opposition ralliée à la cause de Bougane Gueye Dany, a également été rejetée pour le même motif. Elle n’aurait proposé que 26 candidats.

L’objectif du président Macky Sall est de bâillonner la coalition Yewwi Askan Wi

Mais c’est à Dakar que l’influent patron de presse essuie son plus grand revers : il se voit là encore opposer un refus pour cause de « listes incomplètes ». ll s’en est étonné lors d’une conférence de presse, dès le 5 novembre. « Notre mandataire s’était rendu compte après réception de notre récépissé de dépôt de candidature qu’il y avait un problème d’agencement. Mais le préfet de Dakar lui a catégoriquement refusé de consulter le dossier qu’il venait de remettre à la commission. Nous avons décidé d’introduire un recours au niveau de la Cour d’appel de Dakar. Ce rejet ne concerne que la ville de Dakar. Dans 12 communes [de la capitale] au moins, nous avons pu déposer nos candidatures », a-t-il affirmé avant de crier au complot.

Sabotage ?

« Un certain nombre de préfets et de sous-préfets montrent au grand jour leur appartenance à la coalition au pouvoir Benno Bokk Yakaar, a pour sa part fustigé Cheikh Tidiane Youm. L’objectif du président Macky Sall est de bâillonner la coalition Yewwi Askan Wi et de saboter ces élections, qui sont d’une importance capitale. Nous ne le permettrons pas. »

L’opposition peine à se conformer scrupuleusement aux dispositions du code électoral

De fait, la coalition au pouvoir n’a pas connu les mêmes déconvenues et a déjà pu se féliciter de la validation de toutes ses listes. « Nos têtes de listes majoritaires comme proportionnelles ont sacrifié à la tradition républicaine en travaillant avec rigueur, méthode et organisation pour aboutir à une totale et entière recevabilité de nos listes », résume le ministre Seydou Guèye. Volontiers piquant à l’égard de l’opposition, le porte-parole du gouvernement a aussi regretté que ses représentants peinent « à se conformer scrupuleusement aux dispositions du code électoral » et traînent une « carence notoire en matière de maîtrise du processus électoral dont l’élément le plus basique est la confection des listes de candidatures ».

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Méfiante, l’opposition a alors décidé de vérifier elle-même les dossiers déposés par la majorité. La coalition Yewwi Askan Wi a accusé lundi soir les forces de l’ordre d’avoir « agressé » le député Moustapha Guirassy alors qu’il tentait de vérifier la liste de BBY dans sa commune de Kédougou. « Nous maintenons [nos] directives et demandons à tous les mandataires de se rendre dans les préfectures et sous-préfectures de leur localité pour faire valoir leur droit conféré par le code électoral en vérifiant les déclarations et pièces de candidatures [de BBY] », a insisté Yewwi Askan Wi.

Les préfets ont désormais jusqu’à 70 jours avant le scrutin pour établir les listes définitives de candidatures.

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